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Il fallait un solide sang froid et un brin de réussite pour remporter ces 48 heures Azimut. Indécises jusqu’au bout, elles consacrent pour la deuxième année consécutive Jérémie Beyou (Charal), opportuniste chasseur trouvant au ras de l’île de Groix le souffle d’air salvateur. Samantha Davies empoche la seconde place et Isabelle Joschke complète le podium.

Les écarts minimes à l’arrivée doivent beaucoup aux conditions mais démontrent également le haut niveau sportif de l’épreuve.

« On savait que ça allait prendre feu avec le vent qui tombait avant la ligne. Avec Sam (Davies), notre position de chasseur n’était pas mal et il fallait tirer les bons bords pour mettre la balle au fond. J’en ai raté d’autres et j’ai assez cotisé dans ma vie pour savoir que tout ça est fragile mais c’est quand même sympa de gagner ! » Jérémie Beyou avait le triomphe modeste sur les pontons de Lorient La Base après cet incroyable finish des 48 Heures menées comme une étape de la Solitaire du Figaro.

Tout le matinée pourtant, les observateurs misaient volontiers sur Charie Dalin (Apivia) qui pointait encore en tête à 12 milles de la ligne après avoir dominé 80 % du parcours. Puis sur Kevin Escoffier (PRB) qui se glissait à son vent et semblait encore contrôler la situation à 4 milles du but. Mais cette édition n’était pas pour eux... 

Chasseurs et chassés

Transformé en lac sur le coup des 11 heures,  le plan d’eau prenait des airs de terrain vague. Les idées claires, Jérémie Beyou filait à la côte, conservait le plus longtemps le vent et touchait le nouveau zéphyr sous le meilleur angle, suivi à quelques longueurs par Initiatives coeur. Le retour de la brise propulsait aussi sur le podium Isabelle Joschke (MACSF) alors que Clarisse Crémer (Banque Populaire X) suivait à la quatrième place. Trois femmes dans les quatre premiers, beaucoup s’enthousiasmaient sur les pontons de Lorient La Base de ce résultat inédit en course au large.

Performances à tous les étages

Si Charal signe le doublé dans le Défi Azimut et reste invaincu cette année, ces 48 heures Azimut mettent aussi à l’honneur les bateaux de générations précédentes. Car avant que l’arrivée ne bouleverse l’ordre établi, Clarisse Cremer, cinquième,  avait démontré que Banque Populaire X reste une redoutable machine de près, capable  de remonter les meilleurs. PRB datant de la même époque mais équipé de foils était l’auteur lui aussi d’une belle remontada au gré des virements de bords cette nuit.

Et côté nouveaux foilers, ces 48 heures Azimut confirment aussi le potentiel de l’Occitane en Provence d’Armel Tripon. Très à l’aise au reaching bien sûr mais également dans le coup au près, le skipper nantais termine à une douzième place qui ne reflète pas du tout la physionomie de sa course disputée aux avant-postes. 

La flotte au complet ce soir

Alors que les treize premiers sont amarrés dans le port et que chacun refait la régate, Lorient La Base attend maintenant les derniers concurrents qui devraient franchir la ligne en début de soirée. Un timing idéal qui offrira à toutes et tous une bonne nuit de repos avant le tour de l’île de Groix demain. Départ demain à 13 h00 pour le dernier acte de ce dixième Défi Azimut. 

Classement des 10 premiers
1. Charal (Jérémie Beyou), 1j 20h 56min et 59sec
2. Initiatives Cœur (Samantha Davies), à 2 min et 38 sec du leader
3. MACSF (Isabelle Joschke), à 17 min 
4. Banque Populaire X (Clarisse Crémer), à 23 min et 40 sec
5. PRB (Kevin Escoffier), à 36 min et 34 sec
6. Arkéa Paprec (Sébastien Simon), à 42 min et 44 sec
7. Seaexplorer – Yacht Club de Monaco (Boris Herrmann), à 42 min et 56 sec
8. Apivia (Charlie Dalin), à 1h14 et 10 sec
9. Linkedout (Tomas Ruyant), à 1h17 et 41 sec
10. Groupe APICIL (Damien Seguin), à 01h33 et 12 sec

 

ILS ONT DIT 

Jérémie Beyou (Charal), vainqueur des 48 Heures Azimut

« Il fallait du sang froid en effet. La régate n’est jamais finie tant que la ligne n’est franchie. On savait que ça allait prendre feu avec le vent qui tombait et l’arrivée de la brise. Il fallait être bien concentré et  tirer les bons bords jusqu’à la fin, essayer de garder le vent de nord le plus longtemps possible. Après étant dessous, on avait un meilleur angle pour l’arrivée de la brise. Ils ont laissé la porte ouverte et avec Sam, on s’est engouffré dedans.

Notre position de chasseurs n’était pas mal ce coup-ci, car c’est encore revenu par derrière. Je me suis bien reposé cette nuit en me disant que ça jouerait là ce matin et j’ai bien fait. C’est chouette.

Dans l’ensemble, c’était une course intéressante. Ce n’était pas toujours facile de se comparer en vitesse, car les trajectoires étaient un peu différentes, notamment sur le premier bord où certains ont joué la route directe alors qu’il fallait se laisser glisser. Mais on voit bien que tous les bateaux neufs vont vite. On sait que les IMOCA un peu plus anciens comme Initiatives cœur sont aussi au niveau et c’est sympa que Sam soit sur le podium. Idem pour PRB. Ça fait une arrivée comme à la Solitaire du Figaro après 48 heures comme sur la Solitaire du Figaro, donc c’est évidemment intéressant !

Ce doublé a bon goût. C’est toujours plus sympa de gagner que d’être derrière. Je n’ai pas été au sommet de mon art toute la course, mais en sport, si tu es bon pendant tout le matche et que devant le but tu te rates, ça ne marche pas. Là, j’ai su la mettre au fond. Mais j’en ai déjà raté d’autres, j’ai assez cotisé pour savoir que tout ça est fragile ».

 

Samantha Davies (Initiatives Cœur), deuxième des 48 Heures Azimut

 « C’est un beau travail d’équipe pour arriver ici en bonne position, je suis ravie du bateau et de sa préparation. Et puis c’est un sacré finish, assez stressant. C’était prévu avec les routages que l’on finisse dans ces conditions-là. Je savais où je voulais être au moment où la brise tomberait et ça s’est bien déroulé.
Ces 48 heures sont un super boost de confiance avant le Vendée Globe même si les conditions de mer plate sont très différentes. Ca reste un régal de naviguer sur ces bateaux qui sont magnifiques, surtout quand ils sont bien préparés. Tout marche super bien. On est allé plutôt vite et aussi au bon endroit. On était un petit groupe de bateaux avec Kevin, comme à la VALS à naviguer à la bagarre et c’ est intéressant.

Ca joue sur peu de choses, même si l’arrivée est trompeuse. Certains d’entre nous ont profité que ça ralentisse devant. Il y a des groupes très serrés et on se régale d’être au contact. J’avais bien dormi hier pour me préparer. La mer était plate et comme on avait un veilleur, les siestes sont plus récupératrices, on se relâche plus facilement.  Cette nuit, j’ai poussé le bateau et j’ai fait plein de virements pour rester dans mon schéma, en m’obligeant à matosser à chaque fois, même s’il n’y avait pas énormément de vent.»

 

Isabelle Joschke, MASCF, troisième des 48 Heures Azimut

« Je suis super contente, c’était une course très chouette avec des conditions magnifiques, il y a longtemps qu’on n’a pas navigué dans ce genre de conditions royales. Un bonheur ! J’ai bataillé vraiment du début à la fin, j’ai eu de la réussite évidemment au passage de l’île de Groix, sur un finish un peu traditionnel quand on court La Solitaire du Figaro. J’ai profité de la situation, je suis passée au bon endroit, et me voilà sur le podium. Un peu de chance, ça ne fait pas de mal !

J’ai encore appris plein de choses, j’avais plein des préjugés je pensais que mon bateau n’avançait plus dans le petit temps avec ses foils, et de naviguer bord à bord avec Clarisse, ça m’a redonné confiance. La confrontation proche permet d’apprendre encore plein de choses, j’ai redécouvert plein de choses sur mon bateau. C’était vraiment chouette de se faire plaisir. C’est la fin de l’été, et maintenant une autre histoire nous attend ! »

 

Clarisse Cremer, Banque Populaire X, quatrième des 48 Heures Azimut

« C’était super ce duel avec Isabelle (Joschke) et c’était une très belle course !  Il y a eu plein de beaux moments, et je suis super contente d’en avoir bien profité. C’était un peu inespéré de finir quatrième mais je me dis qu’il faut profiter de la chance qu’on a ! Globalement, sur ces 48h, il y a eu de belles nuits étoilées, une mer assez plate, j’en ai bien profité. Les conditions étaient variables et il y avait beaucoup à faire. D’abord un bord assez musclé pour rejoindre le premier way point et puis un dernier tronçon très tactique avec plein de coups à jouer. Je me sens bien sur mon bateau, de mieux en mieux ! » 

 

Kevin Escoffier, PRB, cinquième des 48 Heures Azimut

« C’est assez frustrant. On savait qu’on arrivait dans une dorsale. J’aurais peut-être pu virer un peu plus tôt, mais je suis le premier à enclencher le virement de bord par rapport à Apivia. Je pensais réussir à recroiser devant Charal et Initiatives-Cœur, et puis je tombe dans 0 nœud de vent. J’avais mis pas mal d’énergie, j’avais beaucoup bossé sur les virements, avec full matossage, de belles manœuvres. Je n’étais pas le bateau le plus rapide au reaching sur le premier bord, mais j’ai compensé avec de jolies manœuvres. Je passe sur le premier way point avec Arkea-Paprec et L’Occitane donc c’est bien en termes de vitesse par rapport aux nouveaux foilers. Je me suis amusé tout le temps, mais la fin me rend chafouin. C’est quand même du positif, mais j’aurais bien aimé faire un joli truc. Je ne suis pas sûr de mériter cette place. Il n’y a pas que de la chance, j’avais mon plan, je savais où j’allais. Mais je me suis bien éclaté, physiquement je suis au point, j’ai bien navigué. » 

 

Sébastien Simon, ARKEA-Paprec, sixième des 48 Heures Azimut

« Ca fait du bien de renouer avec la compétition ! Forcément, je suis un peu déçu du résultat, mais je dirais que c’est positif parce que ça veut dire que je me suis pris au jeu. On a bien identifié les phases où je devais encore travailler, notamment à haute vitesse. Nous avons vu au départ de la course le potentiel du bateau, maintenant il faut qu’on travaille dur jusqu’au départ du Vendée Globe. C’était un super parcours, une super course. Je me serais cru à une arrivée d’une Solitaire du Figaro. C’était top ! Il faut que je continue à prendre confiance dans mon bateau, dans mes foils. Ce sont des vitesses au-delà de 25 nœuds et on les atteint très vite même avec 14 nœuds de vent. Maintenant, il faut encore que je navigue dans la brise. Ce qui est positif, c’est que le bateau va très bien, j’ai toujours été au contact des leaders, je les avais toujours à vue, on va y arriver. Le Défi Azimut, c’est super, ces 48h ont été très engagées, on manœuvre beaucoup, sportivement, c’est très intéressant. »

 

Charlie Dalin (Apivia), 8ème des 48 Heures Azimut

« C’est certain qu’on aurait pu imaginer mieux. On est arrivé trop tôt. Le vent n’a pas arrêté de prendre de la droite au fur et à mesure et les poursuivants nous ont fait l’intérieur. Quand j’ai vu que c’était trop tard pour virer, j’ai cherché à me rapprocher le plus possible de la côte pour récupérer la boucle de thermique en premier et le thermique a démarré plutôt du côté de Groix. C’est une déception mais ce que je retiens c’est d’avoir été en tête une grande majorité de l’épreuve. On va souvent vite, voire très vite par rapport à nos adversaires, notamment sur le premier bord.  Sur le deuxième bord et le dernier la flotte s’est beaucoup tassée. Les courses qui reviennent par derrière, c’est un peu le thème de l’année !

J’étais partie avec un media man et un technicien comme veilleur et non pas un performer pour tout faire tout seul. Ne pas pouvoir discuter avec quelqu’un d’une séquence de manœuve ou d’un choix stratégique. Ca permet d’avancer sur pas mal de point de validation. »

 

Damien Seguin (Groupe Apicil), 10ème des 48 Heures Azimut

 « C’est un bilan positif. Le bateau n’a pas de bobo. J’ai l’impression  de bien avoir navigué et d’être à ma place. Après, le parcours n’était pas très intéressant, on était à la queue leu leu tout le temps. Les bateaux qui allaient vite sont partis dès le début. J’ai tiré mon épingle du jeu dans mon groupe de bateaux à dérive. Et puis, c’était sympa de mettre les couleurs d’Apicil en avant sur le départ, c’est un peu ma spécialité ! Sur le reste de la course, la flotte s’est ordonnée, je me suis concentré sur ma course mais rapidement, chacun a occupé la place correspondant à l’âge de son bateau. Ce qui est bien, c’est que ça valide toujours des choses, toutes les modifications effectuées sur le bateau qui est maintenant dans sa configuration Vendée Globe.  Et puis le bateau a un joli look, je me sens protégé. Demain, on a pas mal de monde à bord et le Tour de Groix est un moment sympa »