Vg2020 20210206 pure finishjml 6716b basse dfinition vi

Ce samedi 6 février à 17 heures 06 minutes et 02 secondes (heure française), Romain Attanasio a franchi la ligne d’arrivée des Sables d’Olonne après 90 jours, 02 heures 46 minutes et 02 secondes de course autour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance

Le Breton d’adoption, conjoint de Sam Davies, boucle son 2e Vendée Globe d’affilée à une méritoire 14e place. Il aura séduit du premier au dernier jour par son enthousiasme, la spontanéité et la pertinence de ses échanges avec le peuple des terriens. 

Vg2020 20210206 pure finishjml 6742b basse dfinition vi

La course de Romain

Après un premier tour du monde bouclé il y a quatre ans à la 15e place, Romain Attanasio le savait : « Un Vendée Globe, c’est 80% de galères et 20% de dingue ».C’est dans cette recette qu’il faut savoir trouver son compte. Romain semble l’avoir trouvé et s’être épanoui dans une course qu’il nous a fait vivre jour après jour avec beaucoup d’humour, tournant en dérision et relativisant constamment ses mille problèmes du quotidien, comme pour nous dire : « j’ai choisi d’être ici. C’est intense, c’est difficile mais j’assume pleinement ».

« Mon objectif ? D’abord finir. Et si possible dans la première moitié, avant la 15eplace, ce serait bien »avait déclaré Romain avant de prendre le départ, à 43 ans, de son deuxième tour du monde en solitaire sans escale. Mission accomplie, avec cette 14e place, à bord d’un bateau vieux de 13 ans, un plan Farr qui a énormément bourlingué autour de la planète - ex-Gitana Eighty de Loïck Peyron, ex-Synerciel de Jean le Cam, ex-Newrest-Matmut avec lequel Fabrice Amedeo avait conclu l’édition 2016 à la 11e place.

L’entame de course a douché ses espérances de taquiner le top 10, une première rafale de problèmes techniques l’ayant empêché de se glisser dans le peloton de chasseurs qui a ensuite profité des schémas météo les plus compatissants pour revenir sur les leaders.

Le 14 novembre, donc, peu après le contournement de la dépression tropicale Thêta, le skipper de Pure – Best Western s’attaque à son système de barre, qui connaît du jeu et l’envoie deux fois à l’abattée, la veille, dans des conditions tempétueuses. Dans l’élan, un hook de J2 (un point d’accroche de la voile d’avant sans doute la plus utilisée sur ce tour du monde) et une drisse cassée perturbent sa descente vers le Sud. Et puis le chariot de tête de grand-voile se met à lui causer du tracas également : Romain ne peut plus ariser sa grand-voile comme il le souhaite. S’ensuivra, le 18 novembre, une réparation qui durera 11 heures, avec notamment une montée en tête de mât dont il sortira à demi-traumatisé, mâchoire bloquée par le stress. Il y perd trois places et un nombre imposant de milles sur le peloton de chasseurs.

Vg2020 20210206 pure finishjml 6745b basse dfinition vi

La suite de sa course va se résumer à un très long duo avec Clarisse Crémer, sa compagne de route pendant toute la traversée du Grand Sud. Un pas de deux qui se transforme en ménage à trois dans le Pacifique lorsque le couple se fait déborder par Armel Tripon. Ralenti après le passage du cap Horn, alors qu’il emprunte le détroit de Le Maire, Romain se retrouve seul pendant toute la remontée de l’Atlantique Sud avant de se faire rattraper, cette fois par Jérémie Beyou, avec qui il va naviguer de conserve jusqu’à l’arrivée.

À défaut de jouer la tête, Romain continue de jouer de la tête. Et le skipper de PURE – Best Western partage son épopée avec une bonne humeur et une spontanéité enthousiasmantes. Comme celle de sa montée au mât, la vidéo de sa visite de sa « chambre d’hôtel »ou de son Noël, entre autres, marqueront ce Vendée Globe. Skipper, acteur, commentateur, Romain a plaisir à être en mer. Il partage et fédère. Il parvient même à se montrer rassurant quand, le 13 janvier dans une dépression, il tombe sur un winch, se casse au moins une côte et tombe dans les pommes. « Rien de grave, ça m’arrive souvent ! » Sa blessure ne l’empêchera pas de tenir un temps la dragée haute à Charal dans les dernières centaines de milles. Son arrivée, ce samedi, consacrera une 14e place bien méritée.»

Vg2020 20210207 pure finishjml 6887b basse dfinition vi

Sa conférence de presse

"Je suis très content d’arriver, forcément ça fait tellement longtemps, c’est incroyable cette course. On se bat comme des chiens pour boucler ce tour du monde. On a réussi à le faire, c’est fou !"

Ce qui a changé par rapport à l'édition précédente

"J’avais acheté beaucoup plus de data car les prix ont énormément baissé. Il y a 4 ans je prenais juste mes fichiers météo sur internet et je passais quelques communications avec l’orga et les sponsors. Je me souviens que j’étais juste allé voir sur le net une photo du bateau de Thomas (Ruyant) cassé, mais c'était la seule chose. Alors que sur cette édition on parlait sur whatsapp avec les copains, et puis j’allais sur le net regarder un peu les news. On était un peu moins isolé. Mais bon, j’ai quand même passé 3 mois tout seul ! On parle finalement plus avec les skippers en mer qu’avec les gens à terre, car avec la terre il y a un gros décalage. Avec Jérémie on a pas mal parlé ces derniers jours, car on vivait la même chose. 

J’ai envoyé plus de vidéos, c'était beaucoup plus simple, je le faisais directement avec mon iphone. Je faisais un petit montage directement sur le téléphone et j’envoyais ça en wifi à l’orga. Il y a 4 ans j’avais un camescope, je devais enlever la clé, compresser les fichiers, et l’envoi prenait trois heures !"

Vg2020 20210207 pure finishjml 6879b basse dfinition vi

Ascension au mât

"On est pas mal de skippers à faire le Trophée mer et montagne. On se sert d’une Olivette pour monter le long d’un pylône. Je l’ai utilisé pour monter au mât car ma grand-voile était bloquée. Mais il y avait 2 mètres de creux, c’était plus du tout la même chose, c'était l’horreur. J’étais au bout de ma vie en redescendant. J’ai essayé de tout transmettre : parfois on rigole, mais pas toujours. J’ai dû remonter une deuxième fois et puis j’ai finalement terminé avec un ris dans ma grand-voile. Il y a 4 ans j’avais réparé mon safran près de l'Afrique du Sud."

Une flotte groupée

"Personne ne pensait que les concurrents seraient si proches à l’arrivée. D’habitude ça part toujours par devant. Et là pour les premiers, c'était toujours revenu par derrière. Pour Yannick (Bestaven) ça a dû être infernal. Ça a créé ce groupe qui est toujours resté au contact. Malheureusement j’ai décroché, cette histoire de grand-voile ne m’a pas aidée. Ça avait l’air très intense, ça devait être super pour eux à vivre parce que c'était une vraie régate mais ça devait être vraiment épuisant parce que c’est long un Vendée Globe. Et la fin, c’était vraiment engagé. 

Je me disais que ça a un peu désacralisé l’arrivée du premier qui d'habitude arrive vraiment loin devant, c’est le taulier quoi ! Ca ressemblait plus à une régate qu’à une aventure incroyable autour du monde."

Les sponsors

"J’ai déjà discuté avec mes sponsors pour la suite. Mes partenaires se sont des PME, c’est parce qu’ils sont nombreux qu’ils réussissent à faire le Vendée Globe. Chaque entreprise ne pourrait pas le faire seule. Tout le monde est important, je les remercie évidemment. Pour la suite j'aimerais bien avoir un bateau à foils, je ne demande pas un bateau neuf. Les bateaux à foils ça me fait rêver, c’est fabuleux ! Si d’autres sponsors veulent rejoindre le team, ce sera avec plaisir. Le plus difficile sur un Vendée Globe c’est d’être au départ, j’ai plein de copains navigateurs qui rêvent de disputer cette course, mais c’est dur à mettre en place. Je mesure la chance que j’ai. Dans les moments difficiles, je pense à tous les gens qui sont derrière moi."

Vg2020 20210207 pure finishjml 6890b basse dfinition vi

À propos de l’évolution de la réglementation technique 

"Je suis un des grands partisans de la limitation des coûts. Je n’ai jamais fait partie des grandes équipes. Avec des foils trop grands, on s’est aperçu que c’était compliqué dans le grand Sud. Je pense qu’il faut établir quelques règles avec la classe IMOCA pour limiter la taille des foils. L’essentiel, c’est que ça reste abordable. On ne peut pas monter sur un bateau la peur au ventre. Actuellement, nous sommes encore dans une période d’essai. On ne peut pas utiliser un foiler partout comme dans la baie de Port-La-Forêt. Il est important qu’il y ait toujours plusieurs façons pour un sponsors de s’engager et que ceux qui ont moins de budget puissent continuer à acheter des bateaux plus anciens."

Raconter un Vendée Globe avec humour

"J’ai essayé de mettre de la bonne humeur dans mes récits. Raconter ce que je vivais avec humour, ça permet de couper un peu du stress qu’on ressent dans les situations difficiles. Je voulais raconter ce que vivait un marin en mer, quelqu’un d’ordinaire qui fait quelque chose d’extraordinaire. J’ai raconté les bons comme les mauvais moments. Le pire, c’était au large de l’Afrique du Sud quand trois bateaux ont tapé des Ofni. J’étais au fond de mon bateau à 18 noeuds, dans le noir. Là, je savais que si je tapais un truc, je m’explosais la tête contre la paroie. Et ces moments-là, je les ai filmé aussi."

Une histoire d’abnégation 

"J’ai une qualité parmi mes nombreux défauts : quand je veux quelque chose, je ne lâche pas. Quand j’ai décidé de faire de la voile, je n’étais pas destiné à le faire. J’ai eu la chance de tomber sur les bonnes personnes, comme le banquier que j’étais allé voir à 17 ans alors que je souhaitais faire la Mini-Transat. J’aurais pu être interdit bancaire… Et c’est un peu grâce à lui si je me suis lancé dans la voile. 

Mon idée, c’est aussi de montrer à tout le monde et aux enfants qui suivent le Vendée Globe que lorsqu’on a envie de faire quelque chose, il faut le faire à fond. On peut faire tout ce qu’on veut si on s’en donne les moyens. C’est un peu ma leçon de vie en tant que coureur au large."

LES STATISTIQUES DE ROMAIN ATTANASIO / PURE – BEST WESTERN

Il a parcouru les 24 365,74 milles du parcours théorique à la vitesse moyenne de 11,27 nœuds

Distance réellement parcourue sur l’eau : 27 596,98 milles à 12,76 nœuds de moyenne

Les grands passages

Equateur (aller)
16e le 20/11/20 à 11h35 UTC, 5 jours 12 min après le leader, 1j 22h 14min après le leader

Cap de Bonne-Espérance
14e le 03/12/20 à 16h38 UTC, 2 jours 17h 27min après le leader

Cap Leeuwin
13e le 16/12/20 à 20h27 UTC, 3 jours 09h 01min après le leader

Cap Horn
14e le 07/01/21 à 05h45 UTC, 4 jours 16h 02min derrière le leader

Equateur (retour)
13e le 23/01/21 à 02h03 UTC, 6 jours 06h 51min après le leader

Son bateau

Architecte : Bruce Farr Design
Chantier : Southern Ocean Marine (Nouvelle Zélande)
Mise à l'eau : mars 2007
Anciens noms : Gitana Eighty, Synerciel, Newrest-Matmut

IMG 2033