PRYSMIANGROUP PRISMIAN 2020 07 08  09 04 02

Joint à 5h en approche du waypoint Gallimard, Thomas Ruyant, 3e, nous a longuement raconté sa course, son bateau, ce qu'il reste à faire jusqu'à l'arrivée... Giancarlo, 10e, heureux homme en mer, se satisfait du nombre de choses apprises sur cette compétition intense.

Giancarlo Pedote - 5h05

"Les conditions sont magnifiques, la mer est plate, il y a environ 15 nœuds de vent, le bateau file, c’est super agréable. Il ne fait plus froid. Je regarde la latitude, je cherche des rapprochements sur les côtes, on descend bien vers le sud donc on va retrouver un climat estival.

J’étais bien équipé pour le nord, j’avais ramené tous mes vêtements que j’amènerai sur le Vendée Globe. Mais c’est vrai qu’il faut s’habituer, mettre la couche en plus avant de dormir pour pas se réveiller glacé, quand tu te fais avoir une fois, t’y penses la fois suivante !

Je me sens plutôt bien, j’ai envie d’aller vite vers le waypoint Gallimard et attaquer la dernière partie du parcours. J’arrive à être bien sur mes quarts de sommeil. J’ai eu du mal les premières 48h de course à cause des problèmes électroniques, j’ai eu un peu de mal à rentrer dans la course vu que je passais beaucoup de temps à bricoler pour trouver le faux-contact mais deux jours après c’était bon. Depuis que c’est réglé, je fonce !

C’est un truc de dingue, c’est une course de Figaro pas d’ IMOCA ! On se croise régulièrement, j’ai vu Maxime Sorel hier en fin de journée et Kojiro Shiraishi l’autre jour.

Je cherche les meilleurs réglages pour le bateau pour aller le plus vite possible et regagner les milles perdus. Une fois cela, j’aurai fait mon travail ! Je vais arriver à la marque Gallimard dans 10 ou 12 heures, en fonction de la zone d’affaiblissement du vent. Normalement, elle va se déplacer vers l’avant à partir du moment ou les premiers vont l’atteindre. Ca va continuer à bouger grâce à l’anticyclone qu’il y a derrière. Donc on a des chances pour que les vents continuent à prendre à droite et après ça continuera à l’emporter vers le nord. 

Je suis parti avec un bateau quasiment en configuration Vendée Globe. J’ai beaucoup de nourritures, beaucoup de vêtements, beaucoup de sacs pour m’entraîner au matossage. J’ai envisagé cette course comme un test pour ne pas me retrouver le jour du départ du Vendée Globe avec plein d’affaires que je ne sais pas gérer.

On a encore des choses à améliorer, ça s’arrête jamais ! On trouvera toujours des choses à changer mais on saura mettre des limites." 

Thomas Ruyant - 5h20

"On ne pouvait pas faire beaucoup mieux comme scénario de fin. Il y aura forcément un regroupement dans les heures qui suivent entre les bateaux qui sont autour de moi et ceux qui sont derrière. On sera en plein milieu de la dorsale donc il y aura pas mal de stratégie à faire pour ressortir de là et faire route vers Les Sables d’Olonne. Ca va être interessant jusqu’au bout. Ca va aussi me permettre d’avoir encore des choses à faire et à jouer. Sur un parcours comme celui-ci, on avait beaucoup de chances pour qu’il y ait beaucoup de transitions de ce type. 

Il y aura beaucoup de choses à faire sur cette fn de parcours. Il va falloir aller chercher le bon angle, le vent tourne, il faut soigner ses trajectoires. Ça peut se faire assez naturellement mais ça sera pas une route directe vers les Sables d’Olonne. Il y aura des choses à aller jouer. On va pouvoir sortir des voiles qu’on a pas encore sorties depuis le départ (spi et grand gennaker). Depuis le début on a fait du près, du reaching, du portant dans la brise et il nous manquait ce portant dans les petits airs. On aura sorti toute la garde-robe !

La situation actuelle de la course permet de se rendre compte qu’après l’équivalent d’une transat, on arrive tous en quelques milles d’écart même s’il est certain que la météo a joué pour beaucoup. On a des configurations qui peuvent être très différentes, parfois à notre avantage, parfois moins. Ca permet aussi de trouver les réglages et passer du temps à trouver la bonne configuration. C’est une course qui est pleine d’enseignements pour moi. Pour que le bateau avance bien, il faut quand même pas mal de vent. Les phases de transitions et les petits airs ne sont pas spécialement le point fort avec la configuration de voiles que j’ai. Dans la grosse brise, j’ai pas encore bien trouvé les bonnes manettes du bateau.

Ce sont aussi des bateaux où on n'est plus sur de la vitesse intrinsèque. Aujourd’hui le marin peut décider ou il place le curseur. On a un réservoir de puissance important donc il faut être capable d’aller puiser dedans et de gérer le curseur. Ca va être toute la difficulté du Vendée Globe. Il va falloir définir jusqu’ou on est prêt à aller, jusqu’ou on peut tenir et sur quelle durée. Au delà des points forts et des points faibles des bateaux et des configurations de voile, il y a aussi comment le marin va réussir à gérer tout cela sur la durée.

La gestion du sommeil est une des clés de la course au large. C’est une chose sur laquelle je suis à l’aise et que je continue à travailler. Mais c’est vrai qu’il est dur de lâcher prise, et encore plus sur ces bateaux là, pour aller trouver du sommeil réparateur. Sur cette course je me suis équipé de capteurs pour analyser cela et je suis bien curieux d’avoir la conclusion car je pense ne pas avoir assez dormi. Ces dernières heures ça va, je me suis bien reposé avant d’attaquer la dorsale et être frais pour la fin ! J’ai dû dormir 3h cette nuit par quarts de 20 à 30 minutes, en fonction des alarmes (vitesse, directions de vent, forces du vent, etc). On dort rarement beaucoup plus sur des courses comme cela, sur le Vendée Globe ça peut être un peu plus long.

A bord du bateau, on a essayé cet hiver de bien aménager les parties de vie à bord. La bonne nouvelle de cette course c’est aussi que j’ai pu voir que les évolutions du bateau par rapport à 2019 tombent juste. Ca me permet d’avoir des endroits confortables et pratiques pour bien manger et bien dormir."