Photo: Olivier Blanchet / DPPI

Ils sont 19 marins pour qui cette Transat Jacques Vabre en IMOCA sera un véritable baptême du feu. Certains ont déjà participé à la course en Class40 mais tous le disent : le passage à l’IMOCA est une sacrée marche à franchir. Pour aborder ce grand test en double, certains ont décidé de s’appuyer sur des hommes d’expérience, d’autres ont fait le pari de partir ensemble à la découverte de la course. Portraits de ces bizuths qui jouent la carte de l’enthousiasme.

 

Safran : plus complémentaires qu’il n’y paraît

« Quand on est arrivé ici au Havre avec Nico (Lunven), on s’est regardé tous les deux, on était surexcités, comme des gosses. On avait notre place au sein de cette flotte IMOCA au milieu de tous ces grands noms de la course au large, c’était incroyable. » Morgan Lagravière, tout jeune skipper de Safran, aurait pu faire le pari de l’expérience, s’associer à un des baroudeurs du circuit IMOCA. Mais cette aventure-là, il voulait la vivre avec quelqu’un de sa génération, avec qui les rapports seraient tout de suite évidents. « Ce n’est pas parce que nous sommes du même âge, que nous avons plus ou moins le même cursus, que nous sommes identiques. Morgan est beaucoup plus intuitif que moi. Je suis beaucoup plus dans le rationnel, on se complète parfaitement » résume Nicolas Lunven. Le tandem n’aura pas l’occasion d’expérimenter jusqu’au bout la valeur de cette association. Victime d’une avarie technique, Safran a été contraint de faire demi-tour et d’abandonner.

Le Souffle du Nord : l’esprit Mini comme vecteur commun

Thomas Ruyant et Adrien Hardy se connaissent depuis l’époque où ils écumaient les courses Mini. Ensuite, chacun a fait sa route, Thomas en Class40, Adrien sur le circuit Figaro. L’un comme l’autre ont tenu leur rang plus qu’honorablement avant de se retrouver ensemble à bord d’un IMOCA. Pour Thomas, ce choix-là était comme une évidence : « Avec Adrien, on se connaît bien. Je sais surtout qu’entre nous, il n’y aura pas de précautions inutiles. Si on a quelque chose à se dire, on le dit franchement. On sait que l’autre sera capable d’entendre. » Adrien conçoit, quant à lui, sa présence à bord comme une aide, mais aussi comme un aiguillon. « J’ai un regard forcément plus extérieur que Thomas. Par ma formation Marine marchande, je suis aussi très pointilleux. J’apporte un regard critique sur la préparation de Thomas, sur les aspects techniques en vue de son prochain Vendée Globe. » Qu’on se rassure, les deux comptent bien prendre du plaisir ensemble. « Si on a choisi de faire équipe, c’est aussi qu’on sait qu’on va bien rigoler. »

Newrest / Matmut : formation en accéléré

Pour Fabrice Amedeo, la donne est légèrement différente. Il sait qu’il a beaucoup à apprendre en IMOCA, qu’il va lui falloir acquérir rapidement l’autonomie nécessaire pour manœuvrer son monocoque en solitaire. Il lui fallait donc trouver un coéquipier qui lui permette de progresser, mais qui reste suffisamment ouvert à ses attentes. Éric Péron, au sortir d’une Volvo Ocean Race aux côtés de Charles Caudrelier, lui a paru être le coéquipier idoine. « Éric dispose d’une expertise technique que je n’ai pas encore. En même temps, il garde un œil neuf sur la classe IMOCA. Je ne voulais pas de quelqu’un qui arrive avec des certitudes toutes faites. J’avais besoin d’échanges pour pouvoir m’approprier le projet complètement. » Pour Éric, cette Transat Jacques Vabre est aussi une belle opportunité : « Je sors de l’équivalent d’une dizaine de transatlantiques avec la Volvo. Et je n’ai pas encore abandonné mon projet d’être au départ du Vendée Globe en novembre 2016. Naviguer avec Fabrice est aussi une occasion de montrer que je peux avoir ma place sur la ligne de départ aux Sables d’Olonne ».

Comme Un Seul Homme/ Stand as one : pimenter l’aventure d’un zeste de régate

Éric Bellion l’avoue tout à trac. « Mon profil est celui d’un aventurier avant tout. Mon projet Vendée Globe, part du principe que sur un tour du monde, il existe de belles histoires à raconter. En même temps, j’ai besoin d’acquérir un minimum de culture de la course au large. On ne part pas sur un Vendée Globe sans aucune ambition sportive. Autant partir en croisière. » Pour l’accompagner, Éric a choisi de faire confiance à Sam Goodchild, sur les conseils de Michel Desjoyeaux. « J’ai reçu un sacré coup de main de la part de Michel et de l’équipe de Mer Agitée. Ils m’ont proposé de partir avec Sam qui est un garçon particulièrement talentueux. » Sam a saisi l’opportunité immédiatement. Pour le jeune navigateur britannique, naviguer en IMOCA est une chance qu’il ne faut pas gâcher. « Tout d’abord, Éric est une forte personnalité, quelqu’un auprès de qui j’apprends beaucoup humainement. Et puis, qui sait ? J’aimerais bien être un jour au départ du Vendée Globe, c’est une belle occasion de faire mes premières armes en IMOCA ».

O Canada : la découverte

Éric Holden et Morgen Watson n’ont pas d’autre ambition sur cette Transat Jacques Vabre que de boucler l’aventure et découvrir l’univers de la classe IMOCA. Partis de Toronto sur la côte Pacifique, ils ont convoyé leur bateau, l’ex Spirit of Canada, par la mer en passant par le canal de Panama. Mais les deux savent la hauteur de la marche entre une navigation en double sans objectif de performance et une course au large. « Pour nous l’objectif est avant tout de faire parler du projet, d’essayer de créer des vocations chez nous, de faire reconnaître la voile océanique comme un sport à part entière. » Le tandem a joué avant tout sur la complicité. « Éric et moi, on se connaît bien » témoigne Morgen, « On arrive dans un monde que l’on ne connaît pas, sur un bateau dont on sait qu’il est largement dépassé par rapport aux prototypes de dernière génération. Nous ne sommes pas dans la même approche. D’un côté on a des professionnels qui disposent de moyens pour faire vivre leur projet. Nous on est plutôt bouts de ficelle. C’est pour ça que notre entente doit être une évidence. »