Ils arrivent ! Les premiers concurrents du Vendée Globe franchiront en milieu de semaine la ligne d’arrivée aux Sables d’Olonne. L’une des premières choses qui sera contrôlée à bord, après environ 11 semaines de mer, et avant même que le bateau ne s’amarre à quai, sera le plomb du moteur.

En effet, si les skippers disposent d’une génératrice à bord de leur IMOCA, l’hélice doit rester scellée, puisque seul le vent est autorisé comme mode de propulsion. Ainsi, un moteur est obligatoire pour la sécurité, mais c’est bien le vent l’unique carburant des navigateurs solitaires.

Ainsi, grâce à la puissance des systèmes météo de la planète, alliée à l’innovation technologique de ces 30 dernières années, un skipper IMOCA peut traverser l’Atlantique en 10 jours ou faire le tour du globe en moins de 80, et ce, en autonomie totale.

 
Pour survivre seul dans ce milieu hostile, pour manger, boire, faire de la météo ou veiller sur le bon fonctionnement du bateau, le skipper doit créer sa propre électricité et gérer avec précision son avitaillement. Dans le Grand Sud, un marin en solitaire ne dort que cinq heures sur 24 et a besoin de 5 000 calories de nourriture au quotidien soit près du double d’un terrien. Mais si un Occidental consomme 148 litres d’eau potable en moyenne par jour, à bord d’un IMOCA les skippers ne disposent que d’environ 4 litres pour boire, réhydrater ses plats lyophilisés, voire faire un brin de toilette.

L’autonomie énergétique

Les IMOCA créent de l’énergie grâce à la puissance de l’eau, du vent ou du soleil. Depuis 2012, les skippers cherchent à réduire l’utilisation de gasoil pour recharger leurs batteries. Même si le moteur est obligatoire pour d’éventuels problèmes (assistance, avarie grave, casse des autres sources d’énergie), son utilisation reste très limitée. “Yannick a dû faire tourner son moteur que quelques fois dans le Sud, surtout pour chauffer l’intérieur du bateau”,affirme Jean-Marie Dauris, directeur technique du Team Maître CoQ IV. 

190803 MxH polaRYSE Imoca 0131© Maxime Horlaville

A écouter le témoignage des skippers, les sources d’énergies renouvelables sont devenues les solutions les plus vertueuses quand il s’agit de combiner performance, gain de poids et protection de l’environnement. Aujourd’hui, munis d’outils technologiques toujours plus sophistiqués (centrale de navigation, radars, quille basculante, dessalinisateur, wifi et autres systèmes de communication, etc), les IMOCA sont de plus en plus intelligents, mais aussi plus énergivores. Avec une consommation moyenne de 10 à 12 ampères par heure, chaque team a dû repenser sa façon de produire de l’énergie. Hydrogénérateurs, éoliennes ou encore panneaux solaires, les IMOCA arrivent, à ce jour, à se détacher de plus en plus de l’énergie fossile. 

MaitreCoQyannickBestaven imagesembarquées 2020 murielvdb 12© ©murielvdb.com

En 2020, 90% de la flotte est équipée d’hydrogénérateurs. Ces hélices, développées par l’entreprise créée par Yannick Bestaven, Watt&Sea, ont révolutionné la gestion de l’énergie à bord.“L’hydrogénérateur fonctionne presque en permanence. Il est plus efficace d’utiliser cela que de faire une charge moteur normale car les hydrogénérateurs permettent de maintenir les batteries à niveau, cela fait très peu de trainée et cela permet aussi de gagner du poids. L’utilisation de ces sources d’énergie alternatives à un but à la fois écologique et de performance. On essaye de se battre contre chaque kilo de trop et forcément, charger 200 litres de gasoil pour sa consommation, ne suivrait pas cette logique”, poursuit Jean-Marie Dauris.

MaitreCoQyannickBestaven imagesembarquées 2020 murielvdb 30© ©murielvdb.com

Bien qu’encore peu utilisés, d’autres systèmes de production d’énergie se développent. Dix bateaux se sont équipés de panneaux solaires et quatre avec une éolienne. Watt&Sea développe actuellement un modèle d’éolienne avec un alternateur 100% étanche, une surface d’hélice 25% plus petite que celle des éoliennes disponibles dans le commerce et une conception "sous le vent" qui la rend très stable dans les vagues.  « L’éolienne est aujourd’hui un soutien à l’hydrogénérateur, elle ne peut pas encore le remplacer. Cela fonctionne déjà très bien sur les Ultim, mais la vitesse et la configuration des monocoques sont différents, il faut encore continuer le développement, » conclut Jean-Marie.

Vg2020 20201008 maitrecoq vg bi jml 5844 haute dfinition vi

Gestion de l’eau et de la nourriture 

Cette indépendance est aussi vraie pour les vivres. Une fois les amarres larguées, les marins ne disposent plus d’aucun moyen d’approvisionnement en eau ou en nourriture. Concernant les repas, tout est prévu, quasiment au jour près, en amont par les équipes. Pour ce qui est de l’eau, c’est une autre affaire. Impossible d’amener des litres et des litres d’eau à bord et de prendre un risque de pénurie. Aussi, tous les IMOCA sont équipés de dessalinisateurs. Ce dispositif, qui permet de filtrer le sel de l’eau de mer pour la rendre potable et ainsi éviter au maximum d’embarquer des bouteilles en plastique, est imposé par les règles de la Classe IMOCA. Il est écrit précisément : « un dessalinisateur fonctionnant à la fois manuellement et électriquement est obligatoire à bord. Pour les courses dont la longueur est supérieure à 5000 milles, deux dessalinisateurs fonctionnant à la fois manuellement et électriquement doivent être installés à bord dont un qui doit rester en place ».

 

Vg2020 20200901 yeswecam 1510vgbi 053 basse dfinition vi

Grâce à de nombreuses innovations, les bateaux tendent à devenir davantage autonomes au niveau énergétique, ce qui est un enjeu de taille dans la recherche d’une navigation responsable et toujours plus performante. Les moyens déployés à bord sont donc pensés dans une optique d’autonomie totale ce qui permet aujourd’hui aux marins de terminer leurs courses sans se soucier de leur approvisionnement. Comme le dit Jean Le Cam dans le filme que nous proposons à ce sujet : « Quand on a les panneaux solaires et les hydrogénérateurs en route, on peut faire de l’eau, on est autonomie totale, on pourrait faire quatre tours du monde ! »

Maire Launay