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Ce lundi 1er février à 7 heures 27 minutes et 50 secondes (heure française), Armel Tripon a franchi la ligne d’arrivée des Sables d’Olonne après 84 jours, 17 heures, 07 minutes et 50 secondes de course autour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance. Son temps de course le place à la 11e place.

Le skipper de L’Occitane en Provence, ralenti dès le début du Vendée Globe par des problèmes techniques, s’est accroché jusqu’au bout et s’est offert une sacrée ‘remontada’ de la 32e place à la 11e.

L’ambiance

Une fin de course éprouvante pour Armel Tripon qui avait été contraint vendredi dernier de ralentir au grand large des côtes espagnoles pour laisser passer une violente dépression hivernale générant une mer dantesque dans le golfe de Gascogne. Sous une pluie battante, par 30 nœuds de vent et plus de 5 m de creux, Armel Tripon a doublé la ligne d’arrivée dans la nuit noire. Il était temps : le skipper de L’Occitane en Provence n’avait presque plus de quoi manger, à part quelques biscottes et du miel !

Vg2020 20210201 loccitane finish 5836b haute dfinition vi© © Olivier Blanchet/Alea

La course d'Armel

Avant de prendre le départ du Vendée Globe, Armel Tripon était déjà un marin et un obstiné de la course au large. 84 jours plus tard, il est aussi devenu une voix et un conteur d’aventure. Le Nantais n’a rien perdu de ses talents de pédagogie dont il a fait preuve comme moniteur au centre nautique des Glénan avant de prendre le chemin du large. Une victoire à la Mini-Transat suffit pour faire une vocation et bâtir l’avenir. Il y aura le Class40 avant le Multi50 et la spectaculaire victoire à la Route du Rhum 2018. Puis, place à l’envie de lancer un nouveau projet en autodidacte avec l’architecte Samuel Manuard et le chantier Black Pepper. Ils mettent sur pied un géant de carbone peint en noir, L’Occitane en Provence, relevé par des moustaches jaunes. Il aura navigué 7 000 milles avec et parce qu’aucun projet n’est linéaire, il y a eu les doutes de l’abandon (à la Vendée-Arctique-Les Sables d'Olonne) et le retour en grâce (au Défi Azimut). Lors du Jour-J à Port-Olona, Armel Tripon est serein, le résultat d’un travail sur la respiration et la certitude, aussi, de ne pas être là par hasard.   

Vg2020 20210201 loccitane finish 5834b haute dfinition vi© © Olivier Blanchet/Alea

Coup de barre au large de La Corogne

Le look détonnant de son bateau lui vaut quelques 'Une' de magazines et on lui accole sur les pontons le statut de trouble-fêtes dans le match à la victoire. Ses premières heures de course le confirment : Armel est engagé, déterminé et file vers l’Ouest pour contourner une dépression, avec Thomas Ruyant (LinkedOut) et Louis Burton (Bureau Vallée 2) dans son sillage. Mais les conditions sont musclées et la troisième nuit bien trop agitée. Résultat : la casse du hook de son J3 et l’obligation de faire demi-tour vers La Corogne pour réparer.

Devant déjà, la tête de course creuse l’écart et s’enfuie inexorablement. L’outsider Tripon n’en est déjà plus un. Une semaine plus tard, il doit à nouveau monter en haut du mât avec une scie à métaux et une meuleuse. Puis « faire du composite sur une pièce du puits de foil qui s’était arraché ». Poncer, meuler, coller… Armel parle de « journées à l’atelier », ne désavoue jamais son équipe et il avance, toujours.

Vg2020 20210201 loccitane finish 5841b haute dfinition vi© © Olivier Blanchet/Alea

Le bateau, son « compagnon de route »

Enfin détaché de la phrase la plus célèbre de Michel Desjoyeaux – « Le Vendée Globe, c’est une em… par jour »- Armel Tripon a profité pour gagner de l’expérience, mais surtout pour vivre jusqu’au bout cette aventure hors du commun. Le Nantais a le goût des bons mots et il le démontra tout au long du parcours. C’est le cas lorsqu’il croise son premier albatros aux portes des mers du sud : « Je l’aperçois, noble et majestueux dans son vol plané, comme suspendu ». Il décrit le paysage qui défile depuis le cockpit « comme lorsqu’enfant on regarde par les vitres de l’auto sur la route des vacances »et la « pureté des nuits où les étoiles scintillent comme jamais ». Son bateau devient progressivement « un bon compagnon de route »avec lequel il se sent « en osmose. Il est fluide, facile et ne demande qu’à aller vite ».

Le passage du cap Horn, cerné par les albatros, est une libération intérieure, « un beau moment, une joie intense ». Armel remue les souvenirs, ce rêve enfoui qu’il partageait avec deux amis dont l’un d’eux est décédé depuis. Ensuite, la mer s’est assagie, l’Atlantique a offert un peu de répit et le marin s’est trouvé « plus léger ». Il raconte alors avec fierté ses conversations avec ses trois enfants qui lui détaillent leur quotidien à eux et sa femme « qui (les) gère d’une main de maître ».

L’autre ‘remontada’

Les turpitudes d’Éole et de Neptune ne sont pas oubliées pour autant comme le 12 janvier où le vent claque à près de 40 nœuds, la mer est formée et « le bateau ne fait que trembler ». Quand il s’adresse à ceux qui sont à terre, à travers ses mots du bord et ses vidéos, Armel évoque toujours les conditions, parfois ses sensations mais rarement de sa « remontada ». Lui qui faisait partie du dernier groupe au large des Açores a progressivement remonté le classement, notamment en réalisant une traversée des mers du Sud limpide et impressionnante. 24e au passage de l’équateur, 17e au cap de Bonne Espérance, 13e au Cap Horn, 11e au retour à l’équateur…

L’Occitane en Provence a démontré que les nouveaux foilers n’avaient pas à rougir en matière de performance pure. Sa remontée fantastique s’est achevée à la 11e place, donc, la faute à deux fortes dépressions pour le cueillir avant l’arrivée. Juste avant, Armel avait fait sa « première nuit presque complète du Vendée Globe » et surtout délivré un dernier message de sérénité : « La course au large, c’est l’imprévu, c’est l’école de la patience ». Et Armel Tripon en est assurément l’un des meilleurs ambassadeurs.

LES STATS D’ARMEL TRIPON / L’OCCITANE EN PROVENCE

Il a parcouru les 24 365 milles du parcours théorique à la vitesse moyenne de 11.98 nœuds. 

Distance réellement parcourue sur l’eau : 28 315 milles à 13.93 nœuds de moyenne

LES GRANDS PASSAGES

Equateur (aller)
24e le 24/11/2020 à 06h05 UTC à 5j 4h 45 mn après le leader

Cap de Bonne-Espérance
17e le 6/12/2020 à 16h48 UTC à 5j 17h 37min après le leader

Cap Leeuwin
14e le 18/12/2021 à 10h55 UTC, 4j 23h 29min après le leader

Cap Horn
13e le 6/01/2021 à 08h01 UTC, 3j 18h 18min après le leader

Equateur (retour)
11e le 19/01/2021 à 20h32 UTC, 3j 01h 20 min après le leader

Son bateau
Architecte : Samuel Manuard
Chantier : Black Pepper Yachts 
Mise à l'eau : janvier 2020