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Après six jours d’une course éprouvante, la tête de flotte IMOCA engagée sur la Route du Rhum-Destination Guadeloupe 2022 atteindra les alizés dans moins de 24 heures, ce qui marquera alors le début d’une grande descente vers les Caraïbes.

Charlie Enright, skipper de 11th Hour Racing Team, ne participe pas à la course mais observe attentivement le scénario depuis la base de l’équipe à Concarneau. Et il n’a rien à envier à ses concurrents qui, entre Saint-Malo et les Açores, ont dû faire face à pas moins de trois fronts actifs.

“En temps normal, sur une transat d’automne, on part vers le sud-ouest et après un front on retrouve les alizés et c’est parti,”résume Charlie Enright, skipper du team favori de la prochaine course The Ocean Race. "Le moins que l'on puisse dire, c'est que cela a été beaucoup plus compliqué que cela ; à commencer par le report du départ de la course et il est certain que la météo est plus atypique et moins fiable que par le passé."

L’Américain a beaucoup appris sur les différentes équipes dans leur manière de faire face aux conditions, que ce soit pour les bateaux neufs ou sur des bateaux déjà éprouvés ou encore sur ceux des bizuths. ”C’est un mélange très intéressant, non seulement de conditions mais aussi de bateaux à différents stades de leur vie", résume-t-il. 

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Nous avons demandé à Charlie de nous citer quelques marins qui l'impressionnent depuis le départ. Bien sûr, la performance la plus remarquable jusqu'à présent a été celle de Charlie Dalin qui s’est imposé sur cette course depuis les premières heures de courses, comme il l'a fait sur toutes les courses des IMOCA GLOBE SERIES 2022. Nous lui avons également demandé s’il était surpris de la capacité de Charlie Dalin à garder tous les bateaux neufs derrière lui ? "Sur la base de ce que j'ai vu tout l'été ici à Concarneau (chez MerConcept, où APIVIA est également basé),non je ne suis pas surpris", répond-t-il sans détour. 

Il affirme que les performances de APIVIA 1 n’ont cessé de s’améliorer depuis sa mise à l’eau (août 2019) et souligne que tous les bateaux les plus récents - Charal, Biotherm et Holcim-PRB notamment - ont été conçus pour être rapides et constants surtout dans les vents portants du Grand Sud. "Une grande partie des améliorations apportées à la conception des bateaux, de la génération 2020 à la génération Vendée Globe 2024, ont été orientées vers les vents forts que les bateaux rencontreront dans les mers du sud, c’est-à-dire pour des conditions que nous ne rencontrerons pas sur une transat comme celle-ci,” explique-t-il. 

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Sans surprise, le prochain choix de Charlie Enright se porte sur la Suisse Justine Mettraux qui mène sa première transat en solitaire en IMOCA d’une manière impressionnante à bord de Teamwork (l'ancien Charal 1). Pour l'instant, elle navigue au nord du groupe de cinq bateaux de tête, à la poursuite de Charlie Dalin, et tient la sixième place. Elle joue sa propre course sur un parcours qui l'a menée seule au milieu de l’archipel des Açores.

"C'est un marin extraordinaire", confie Charlie Enright au sujet de celle qui tente de devenir la première femme suisse à terminer le Vendée Globe et qui sera également un membre clé de 11th Hour Racing Team sur The Ocean Race. "Personne ne travaille plus dur que Justine - nous le savons tous - et nous avons de la chance de l'avoir dans notre équipe. Nous espérons que dans les prochaines 24 heures, elle rattrapera le groupe de concurrents devant elle”, ajoute-t-il. 

Charlie Enright a observé les skippers et les bateaux qu'il affrontera sur The Ocean Race à partir du 15 janvier et le Français Paul Meilhat sort du lot. Il occupe actuellement la quatrième place du classement sur son Biotherm qui sort à peine de chantier et qui n'était donc en aucun cas 100% prêt pour cette course. 

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"Je dirais que dans le groupe de tête de la flotte, sur la base de ce que nous avons vu, avec le temps de préparation et les ressources allouées, Paul est certainement le plus impressionnant à ce jour", déclare Charlie. "Le bateau est encore loin d’être fiabilisé et il semble avoir de très bonnes capacités. Paul n'a pas le temps d'être distrait ou d'expérimenter des choses sur cette course, tout ce qui compte est de rester concentré sur l’essentiel et on voit bien la valeur de cela dans la campagne de Paul actuellement."

Charlie Enright est impressionné par le skipper de 40 ans, vainqueur de la Route du Rhum en IMOCA en 2018 et co-skipper en 2021 sur APIVIA. "Il est très naturellement talentueux. Il est logique et ne fait pas de fioritures. Il semble se concentrer sur les bonnes choses", explique-t-il. "Quand on voit ce qu'il a réussi à faire en très peu de temps sur son nouveau bateau et les résultats qu’il a obtenu l’an passé en duo avec Charlie Dalin, il n'est pas étonnant que Paul s'en sorte si bien."

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Kevin Escoffier sur le nouveau Holcim-PRB, sera aussi un adversaire de taille sur The Ocean Race l’an prochain. Paul Meilhat et lui se disputent actuellement la quatrième place du classement, à quelques 100 milles du leader. "Kevin est un compétiteur féroce et ce n'est pas une surprise de le voir en tête du peloton, étant donné tout ce qu'il a fait en solitaire avant le dernier Vendée Globe”, déclare-t-il.

Pour Charlie Enright, aucun doute qu’APIVIA atteindra les alizés en premier et consolidera sa position, mais la course est loin d’être terminée. Aussi, il nous reste encore cinq à six jours pour suivre ce match passionnant qui pourrait bien, selon lui, donner aux poursuivants une occasion d’activer leur mode grand vitesse grâce à leurs foils.

"Je m'attends à ce les bateaux neufs soient performants dans ces conditions, mais cela sera probablement compensé par le fait que Charlie touchera en premier les vents portants. Les premiers distanceront les autres rapidement. Cela dit, si vous regardez la carte, ils ne sont qu’à mi-chemin - il reste encore beaucoup de milles à parcourir."

Un élément qui pourrait encore jouer un grand rôle est la possibilité d'un regroupement sous le vent de la Guadeloupe dans les derniers milles, quelque chose dont Charlie Dalin lui-même a parlé avant le départ. Le skipper d'APIVIA est bien conscient que les derniers milles peuvent être décisifs et constituent un élément majeur de la course. Charlie Enright convient que les choses peuvent encore changer à l’avant de la flotte. ”En effet, le chemin est encore long et il y a encore des coups à jouer”, conclut-il.

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Après le naufrage de Nexans-Art & Fenêtres, suite à un incendie à bord, et le sauvetage spectaculaire de son skipper Fabrice Amadeo, 34 des 38 IMOCA qui ont pris le départ le 6 novembre sont toujours en course. Oliver Heer ferme actuellement la marche après avoir dû s’arrêter à deux reprises, à Saint-Malo et Port-La-Forêt, pour réparer son IMOCA endommagé au départ lors d’une collision avec DMG MORI Global One. 

Plus à l’arrière de la flotte, l'une des performances impressionnantes jusqu'à présent est celle du marin chinois Jingkun Xu qui participe à sa première course en IMOCA après seulement deux semaines d'entraînement sur China Dream-Haikou, l'ancien bateau d’Alan Roura. Après avoir été stoppé par des casiers au large du Cap Fréhel et avoir subi quelques dégâts au niveau de ses voiles, le marin de Qingdao, auquel il manque une partie de son bras gauche, est toujours en 29ème position, actuellement à 75 milles au nord-est de Sam Miguel aux Açores et à environ 560 milles de Charlie Dalin.  

Ed Gorman (traduit de l’Anglais)