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Dans la quête incessante de l'optimisation des performances des IMOCA de dernière génération, les équipes disposent aujourd'hui d'un arsenal presque illimité de données pour disséquer chaque aspect de leur bateau. Ces données fournissent des informations cruciales pour affiner les stratégies de navigation, maximiser la vitesse et préserver l'intégrité structurelle des bateaux.

Alors que la saison s'annonce pleine de défis avec au programme pas moins de deux transatlantiques et un Vendée Globe, Justine Mettraux a pris le temps d'expliquer l'importance capitale de la collecte et de l'analyse de ces données dans la quête de la performance optimale.

Rattachée à l’écurie Beyou Racing, Justine Mettraux incarne une approche résolument axée sur la performance, une quête incessante visant à grappiller quelques précieux nœuds à son foiler. La navigatrice genevoise de 37 ans a pleinement intégré cette mentalité dans sa préparation en vue du Vendée Globe, la plus prestigieuse des courses en solitaire.

"Chaque instant passé sur l'eau, que ce soit pendant les entraînements ou en compétition, est minutieusement enregistré grâce à des capteurs", explique-t-elle. "Des capteurs de charge sur le gréement aux capteurs d'extension sur les foils, en passant par ceux mesurant l'inclinaison de la quille et le niveau de remplissage des ballasts, nous sommes immergés dans un océan de données essentielles à notre analyse."

Cependant, dans cette quête de la perfection, une donnée reste encore insaisissable par les capteurs automatiques : le plan de voilure utilisé à un moment précis. "Nous devons saisir manuellement cette information à chaque changement de voile", précise-t-elle. "Cela garantit l'exactitude des données enregistrées et facilite leur analyse ultérieure."

 

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Au sein de l'équipe Teamwork-Team Snef, Julien Villion est cette année en charge de la performance du bateau et donc de la collecte des données. Cette approche vise à une évaluation constante des données afin de fournir à la navigatrice suisse un "tableau de bord" complet lui permettant d'exploiter pleinement le potentiel de son IMOCA  dans toutes les conditions de mer et de vent.

"À chaque sortie en mer, nous nous assurons avec Julien que toutes les données nécessaires ont été correctement saisies", explique Justine. "Nous transmettons ensuite l'ensemble des données à Valentin Le Pivert de KNDmarine, l'une des principales entreprises d'analyse de données dans le monde de la voile de compétition."

En retour, Justine Mettraux et Julien Villion reçoivent un guide des bonnes pratiques basé sur les données recueillies sur le plan VPLP. Ces informations permettent à la skipper d'améliorer son "tableau de voiles", qui lui permet de choisir la voile la plus adaptée aux conditions en mer, d'affiner les polaires du bateau indiquant la vitesse cible dans différentes conditions, ainsi que des tableaux détaillés sur des sujets tels que le remplissage optimal des ballasts ou le réglage des foils.

Valentin Le Pivert livre généralement ces informations sous forme de graphiques, avec des nuages de points permettant d'identifier les points clés des réglages du bateau. Une grande partie de ces données peut être intégrée au logiciel de navigation Adrena pour réaliser des routages plus précis en fonction des caractéristiques réelles du bateau.

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"L'idée est d'être de plus en plus performants", explique la navigatrice suisse, qui note méticuleusement ce qui fonctionne ou non à bord de son bateau pour continuer à progresser. "À chaque sortie en mer, nous apprenons davantage sur notre bateau et nous prenons soin de noter chaque nouvelle découverte. Cette collecte de données nous permet ensuite de trouver plus rapidement les réglages optimaux dans toutes les conditions."

Cette année, Teamwork-Team Snef vise haut avec comme objectif principal le Vendée Globe. Bien que Justine Mettraux soit une nouvelle venue dans le monde du tour du monde en solitaire, elle a déjà laissé une marque indélébile, impressionnant lors de la Route du Rhum où elle a terminé à la 7ème place, et en s'associant à Julien Villion pour une belle 6ème place lors de la dernière Transat Jacques Vabre. Son bateau a subi des évolutions au cours des deux dernières années, mais le changement le plus significatif est bien l'installation de nouveaux foils, plus grands, cette année.

Le projet a débuté l'hiver dernier, avec une refonte de la structure des puits de foils pour accueillir ces nouveaux appendices. L'objectif ambitieux est de les intégrer dès la fin du chantier, prévu pour la fin du mois de mars. Ces nouveaux foils offriront à Teamwork-Team Snef la possibilité de voler plus tôt, même dans des conditions de vent plus faibles, ce qui devrait réduire l'écart de performance avec les bateaux plus récents.

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Pour Julien Villion, si les données jouent un rôle crucial dans le processus décisionnel en matière de performance, le choix de changer les foils résulte d'une combinaison subtile de connaissances spécifiques et d'expérience, impliquant une concertation entre plusieurs acteurs.

"Il fut un temps où seul le skipper ou le propriétaire du bateau discutait avec les architectes. Aujourd'hui, nous sommes une équipe d'une dizaine de personnes autour de la table lorsque des décisions importantes sont prises : des architectes, notre bureau d'études, les navigateurs et les performers", explique-t-il. "Il y a une multitude de retours d'expérience et de données pour étayer nos choix."

Malgré cette abondance de données, Villion insiste sur le fait que l'instinct marin, la capacité à lire la mer et le vent, reste un élément crucial de toute campagne IMOCA.

"Je comprends ce que disent les ingénieurs ou les analystes de données, mais j'apporte aussi mon expérience de marin, et je pense que c'est crucial", souligne-t-il. "Les marins savent comment ils veulent naviguer, les sensations qu'ils recherchent, la vitesse maximale qu'ils veulent atteindre, etc. Chaque skipper est différent, et c'est pourquoi la collaboration entre les experts techniques et les navigants est si essentielle."

 

Ed Gorman (traduit de l'anglais)