Servane Escoffier : "On a hâte de le prendre dans nos bras"

C’est le cas de la famille de Louis Burton. Le marin réalise une course impressionnante à bord de son Bureau Vallée 2. Le skipper a rapidement été l’un des animateurs de la flotte avant que de graves problèmes de pilote automatique n’entraînent un violent empannage sauvage dans le Grand Sud.

Les dommages causés à son rail de mât et les problèmes de drisse ont forcé le Français de 35 ans, qui pointait alors en septième position, à quitter le groupe de tête pour aller s’abriter sous le vent de l'île Macquarie (au Sud de la Nouvelle-Zélande). Là, il est monté à plusieurs reprises dans son mât pour effectuer des réparations, tandis que son bateau naviguait lentement sous foc seul.

© Louis Burton

A l’issue des réparations, le skipper - meurtri et contusionné – a repris sa route à la onzième place, à plus de 900 milles des leaders… Il semblait alors avoir quitté définitivement le top 5, mais il s’est depuis, littéralement dépassé. En effet, Louis a ensuite franchi le Cap Horn en sixième position et se bat maintenant pour la première place aux côtés de Charlie Dalin (APIVIA).
 
Sa femme, Servane Escoffier l'a soutenu à chaque étape de ce parcours particulièrement exigeant. Elle appartient à l'une des grandes familles françaises de la course au large et est l'une des navigatrices les plus accomplies de ce sport, avec plusieurs transatlantiques et un tour du monde en double à son actif. Servane sait exactement ce que son mari a dû affronter et est manifestement une force d'énergie positive que Louis est heureux de saluer.

Lors d'une vacation, organisée juste après ses réparations, il s’était confié à son sujet. "Ma femme ? Elle est incroyable, incroyable et l'équipe aussi. J'ai leur soutien jour et nuit - c'est génial."

Alors, comment se déroule la vie de Servane Escoffier - cousine du skipper de PRB, Kevin Escoffier – depuis que Louis a pris la mer il y a 70 jours, la laissant ainsi s'occuper, entre autres, de leurs deux enfants, un garçon de neuf ans et une fille de sept.

© Olivier Blanchet/Alea

Elle décrit simplement sa routine sept jours sur sept à Saint-Malo où la famille est installée. "Je porte les casquettes d'épouse, de mère, de chef d'équipe et d'entreprise",résume-t-elle à la Classe IMOCA. "A terre, quand Louis est là, nous partageons le travail et les enfants, mais quand il est en mer, ce n'est forcément pas la même chose ".

"Le plus important", ajoute-t-elle, "est d'essayer d'être là pour les enfants et de s'assurer que leur vie n'est pas trop chamboulée. Louis et moi formons vraiment une équipe. Avec le team technique et l'équipe commerciale, j'essaie de gérer tous les projets. J'essaie de faire de mon mieux, mais il est certain que je fais parfois des erreurs - je peux être stressée ou bien plus calme, mais je suis tellement occupée que je pourrais être au téléphone sans arrêt", ajoute-t-elle en riant.

Servane explique qu'elle et Louis se parlent rarement, voire jamais par téléphone, mais préfèrent utiliser WhatsApp qui, dit-elle, a révolutionné la communication avec son mari depuis le dernier Vendée Globe. Grâce à cela, elle est en mesure de le tenir régulièrement au courant de toutes les nouvelles quotidiennes concernant les enfants et leur vie à la maison.

"Louis est quelqu'un de très concentré lorsqu'il navigue", dit-elle. "Mais il aime être en contact avec les gens qu'il aime et ses sponsors aussi, donc WhatsApp, c’est vraiment très bien".

© Stéphane Maillard / Bureau Vallée

En échangeant avec Servane, on comprend vite que lorsque son mari a dû s'arrêter pour réparer son gréement, la peur était réelle de voir ce troisième Vendée Globe se terminer là, malgré une première partie de course prometteuse à la barre de l'ancien Banque Populaire VIII d'Armel Le Cléac'h (vainqueur de l'édition 2016-17). Elle l'a aidé en l'encourageant et en le soutenant, mais elle dit que Louis est totalement concentré sur les objectifs qu'il se fixe et qu'il était pleinement motivé pour surmonter ces problèmes et repartir.

"Je connais mon mari",explique celle qui dirige avec lui une entreprise qui mène des projets sportifs et notamment avec de jeunes coureurs au large. "Je sais comment il s'y prend pour tout, au quotidien dans la vie et dans son travail - c'est quelqu'un qui aime la vie et ne s'arrête jamais, jamais. S'il essaie de faire quelque chose, il le fait à 100%, donc je connais parfaitement sa force mentale".

 

© Stéphane Maillard / Bureau Vallée

Pour continuer sur ce thème, Servane Escoffier affirme qu'elle n'a pas été surprise de voir son compagnon se battre en tête de flotte ces dernières semaines. Nous lui avons demandé si elle pensait qu'il pouvait encore gagner la course, mais elle estime que ce n'est pas aussi important que de regarder ce qu'il a déjà accompli. "Dans le contexte actuel, pour être honnête, Louis a déjà gagné, quand on considère où il en était et où il en est maintenant. Le reste n’est que du bonus",affirme-t-elle.

En attendant, Servane et les enfants attendent avec impatience le retour de Louis aux Sables d'Olonne. "Tant qu'il n'est pas rentré, j'essaie de lui enlever la pression autant que possible",confie-t-elle. "J'essaie de le faire rire et de lui dire : OK, cette dernière partie est la cerise sur le gâteau. Il est certain que nous avons très, très envie de le serrer dans nos bras, mais il reste encore une douzaine de jours à patienter - nous sommes un peu comme des enfants à Noël qui attendent que le Père Noël entre dans la maison…"

Ed Gorman / IMOCA