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Les planètes s’alignent en un bel agencement pour LinkedOut, son voilier porteur des valeurs de l’inclusion, et son skipper Thomas Ruyant, en phase avec le tempo quelque peu démoniaque d’une préparation au Vendée Globe.

Les navigations post confinement s’enchaînent avec bonheur depuis la mise à l’eau du plan Verdier le 19 mai dernier, avec leurs corollaires de mises au point mais aussi de satisfactions quant aux choix ergonomiques drastiques décidés cet hiver. La Vendée-Arctique-Les Sables s’avance, une épreuve originale, pionnière par maints égards, et dont les senteurs arctiques et Islandaises inspirent grandement le marin Dunkerquois impatient de renouer avec cette expérience ultime de la navigation en solitaire, en course et en Imoca, qu’il n’a plus pratiqué depuis son aventure tronquée du Vendée Globe 2016. La Vendée - Arctique - Les Sables sera aussi la première course du monocoque de 60 pieds sous son nouveau nom LinkedOut qui portera tout au long des mois qui viennent le message de l'inclusion et d'une société plus fraternelle envers les personnes en situation de grande précarité.

Une réponse adaptée aux nouvelles conditions de vie à bord de voiliers « volants"

Certes, Thomas a depuis accumulé les navigations en compétition, en Imoca sur des formats en double, et en solitaire en Figaro, mais la Vendée-Arctique-Les Sables, départ le 4 juillet, constitue bien le retour du navigateur Nordiste en course, en solitaire à bord d’un voilier de la Class Imoca. « Cette constatation ne m’a même pas effleuré » avoue le skipper de LinkedOut. « Nous avons beaucoup navigué en faux solitaire, des sorties durant lesquelles les marins qui m’accompagnent me laissent seul gérer toutes les manoeuvres. Loin de toute appréhension, je ne ressens qu’une immense excitation à l’idée de me retrouver seul à bord de mon magnifique coursier durant une bonne douzaine de jours. » Il faut dire que l’an 2 du voilier aux couleurs du « réseau professionnel de ceux qui n’en ont pas », révèle la mise en place d’une ergonomie originale propre à insuffler davantage encore envie et sérénité au marin Nordiste. « Nous avons véritablement mis en place à bord de LinkedOut les éléments idéaux pour appréhender au mieux, en confort (certes relatif) et en sécurité (certaine celle-là) la navigation sur ces voiliers foilers de l’extrême. » explique Ruyant. « Les plus spectaculaires des images aériennes que l’on découvre aujourd’hui de nos bateaux « en vol » peinent à suggérer la violence qu’ils imposent aux hommes du bord ! Pour y vivre, ou y survivre, il fallait envisager une toute nouvelle ergonomie. C’est ce que toute l’équipe de TR Racing est parvenue à réaliser cet hiver dans les conditions que l’on connaît. Le résultat me comble. Siège « dos à la route », couchette, aménagements des postes de travail et d’alimentation… tout ce que nous avons mis en place fonctionne parfaitement et s'avère idéal pour nos types de bateaux. »

Ne pas oublier le bonnet

Heureux de renouer avec la longue course, hauturière à souhait et en solitaire, Thomas endosse aussi naturellement sa casaque de compétiteur. « A quatre mois du Vendée Globe, j’ai envie d’aller vite, de bien utiliser le bateau dans toutes les configurations qui vont s’offrir à nous, y compris sous des latitudes glaciales du côté de l’Islande. il ne faudra pas oublier le bonnet. » Et cette Vendée-Arctique-Les Sables semble étudiée pour répondre précisément à ces envies d’allures et de conditions variées, travers aux grands système météos d’Atlantique Nord. « Nous allons partir plein Nord et flirter avec le cercle polaire Arctique, avant de croiser à nouveau les trajectoires des dépressions en redescendant jusqu’aux Açores. Des contrées arctiques inhabituelles en cette partie de l’hémisphère Nord pour les voiliers de la Classe Imoca. J’ai eu l’occasion, en croisière à bord d’un vieux gréement, de monter jusqu’aux Lofoten, dans l’ouest de la Norvège, mais cette nouvelle destination Islandaise m’inspire. Jusqu’au milieu du XIXe siècle, les Dunkerquois sont pratiquement les seuls Français à avoir fréquenté les eaux islandaises, avec quelques marins basques.  Dès 1767, les pêcheurs de Dunkerque s’orientaient vers « la pêche à Islande ». Avant de partir pour six mois de campagne et peut-être, ne jamais revenir tant ces expéditions étaient meurtrières, les pêcheurs faisaient la fête. C’est cet esprit qui préside encore aujourd’hui lors du fameux carnaval de Dunkerque. J’ai été nourri de ces traditions, et l’idée d’aller naviguer dans le détroit du Danemark, entre Groenland et Islande, route des Vikings, rajoute à mon envie d’en découdre."

Thomas Ruyant, un marin en Nord

Thomas Ruyant avance à pas comptés et mesurés dans une carrière de navigateur pourtant souvent faite de creux et de bosses.  A l’enthousiasme et à l’inépuisable débauche d’énergie de ses premières navigations, l’entrepreneur - skipper de 39 ans a allié la réflexion, l’astuce et le discernement, pour construire en une démarche toute personnelle un projet en capacité de jouer la victoire dans la plus belle, la plus majuscule des courses à la voile, le Vendée Globe. Souvenons-nous ; le 21 décembre 2016, il mettait un terme, contraint et forcé, à sa première expérience sur ce tour du monde en solitaire, sans escale ni assistance, amarrant en Nouvelle Zélande son « Souffle du Nord » démantibulé, fracassé par un OFNI, mais héroïquement sauvé et ramené à bon port.

Une victoire plus tard, dans la transat en double AG2R La Mondiale aux côtés d’Adrien Hardy, Thomas posait avec un bel entêtement les jalons du seul projet tangible à ses yeux, celui de la construction d’une machine capable de l’aider à revenir sur cette épreuve majuscule avec des prétentions crédibles à la victoire. Un pari culotté car « je n’ai pas de plan B » affirmait-t’il alors. Point d’échappatoire, mais une vraie recette, celle de la fidélité en amitié. Il s’attache, à chaque poste clé de son ambition, les services des hommes en adéquation avec ses idées, son histoire et sa personnalité. Alexandre Fayeulle, Marcus Hutchinson, Laurent Bourguès, François Pernelle, Lucas Montagne… Ruyant fait du Ruyant, sans modèle ni mentor, assumant et construisant avec conviction un projet à son image, ambitieux, volontaire, innovant.

De ses victoires (vainqueur de la Mini Transat, de la Route du Rhum en Class 40 notamment), nombreuses, de ses échecs, plus rares, il s’est forgé une méthode, basée sur l’exigence du résultat, fruit d’un pragmatisme bien Nordique qui ne laisse aucune place à l’esbroufe. Ruyant ne joue pas, Ruyant ne transige pas. Son rêve de Vendée Globe, c’est en survivant au Pacifique, à bord de son Imoca disloqué qu’il l’a imaginé voici quatre années déjà. Place à l’excellence, à la rigueur. L’ère nouvelle des bateaux « qui volent » ne laisse aucune place aux compromis et aux "à peu près". Cela tombe bien ! Thomas n’envisage plus son métier de marin qu’en terme de perfection. Oui il a grandi Thomas. Son rêve aussi, qui arrive à présent à maturité avec le soutien indéfectible d’Advens et l’ambition de changer les comportements en matière d'inclusion avec LinkedOut, prêt pour la grande aventure, pour que se délite définitivement l’aigreur de 2016.

Cap sur Port La Forêt

Thomas Ruyant participera dès demain à un stage du pôle Finistère de Course au Large, une belle occasion de se confronter à la concurrence et ses camarades de jeu tels que Kévin Escoffier, Jérémie Beyou, Nicolas Troussel, Charlie Dalin... Les coureurs s'élanceront dès samedi pour un grand parcours, entraînement "grandeur nature" pour la Vendée - Arctique - Les Sables qui se jouera à huit clos. Les voiliers engagés se rendront sur la ligne de départ de la première compétition IMOCA dès le 3 juillet. L'épreuve, pour les raisons sanitaires que l'on connaît, n'accueillera pas de village "départ" aux Sables d'Olonne.