J-2 du Retour à la Base - Romain Attanasio « La course s'annonce bien. Elle va être rapide. »
Nous y sommes. Voici le début de la dernière ligne droite vers le Vendée Globe 2024 et celle-ci commence par le départ ce jeudi 30 novembre de la première édition d’une nouvelle transat en solitaire, dédiée aux IMOCA, baptisée le Retour à la Base, en hommage à son parcours qui rallie la Martinique (destination de la récente Transat Jacques Vabre) à Lorient (port d’attache de nombreux skippers).
Ils seront 32 marins à s’élancer sous le soleil et la douceur antillaise, avant de gravir l'Atlantique Nord au cœur de l'hiver, un défi particulièrement relevé qui, pour beaucoup, représente un élément clé vers un premier sésame pour la qualification au Vendée Globe.
Tout à l’envers
Ce parcours, c'est un peu la Transat Jacques Vabre à l'envers et l’ambiance sur les quais de Fort-de-France mèle la préparation minutieuse à une certaine nervosité compréhensible face à ce qui s'annonce comme une traversée d'ouest en est rapide.
Romain Attanasio est un habitué de l’IMOCA et, alors qu'il vise son troisième Vendée Globe, le skipper de Fortinet-Best Western résume sans détour les 3 500 milles à venir.
« Pour être honnête, ce n'est vraiment pas facile. Lorsque je croise d'autres skippers sur le quai, tout le monde me dit « mais pourquoi on fait ça ? » », lance-t-il. « On est tous fatigués et la route n’a rien de simple, on le sait. »
« L'Atlantique Nord est mal pavé en hiver et nous n'avons eu qu'une semaine pour récupérer de la transat en double, ce qui n'est pas suffisant », pourquit-il. « Néanmoins, nous sommes contents de rentrer en France en course même si cela n’a rien d’anodin ».
Romain fait ensuite une excellente remarque sur les courses IMOCA de manière générale. Avant presque toutes les grandes épreuves, nous nous sommes habitués à entendre les skippers parler de la manière dont ils allaient préserver leurs bateaux et ne pas se laisser trop emporter par la compétition aux dépens d'eux-mêmes ou de leurs bateaux. Cependant, lorsqu'ils se retrouvent tous lachés sur le terrain, entourés des concurrents et suivis par des milliers d’accros de la cartographie, il se passe quelque chose de tout à fait différent.
« Tout le monde dit qu'il ira lentement, qu’il vaut mieux prévenir que guérir, mais vous savez, » explique-t-il en riant, « nous sommes un peu stupides. Quand vous nous donnez une ligne de départ et une ligne d'arrivée, il est difficile de se mettre en mode convoyage. C'est pour ça qu'il ne sera pas être simple de mettre le curseur au bon endroit ».
Deux étapes sur l’Atlantique
Pour la Franco-allemande Isabelle Joschke, skipper fidèle de l’IMOCA qui en est à sa septième saison, l'envie de courir est forte après une Transat Jacques Vabre assez frustrante. En effet, en début de course, elle et son co-skipper Pierre Brasseur avaient dû se dérouter vers Lorient pour réparer leur grand-voile.
« Cette course est qualificative, donc en quelque sorte obligatoire », déclare le skipper de la MACSF, première femme à remporter une étape de la Solitaire du Figaro. « Avant de partir du Havre, je m'étais dit que j'allais faire le Retour à la Base sans pression. Et aujourd'hui, c'est un peu différent car, sportivement, la Transat Jacques Vabre ne s'est pas déroulée comme nous voulions. Je suis dans un entre-deux, entre y aller ‘facile’ parce que ce n'est pas mon objectif sportif absolu, et aussi régater pour être dans le coup ».
Isabelle trouve intéressant ce défi de courir une nouvelle course, à une nouvelle période de l'année, en solitaire quelques jours après une transat en double. Elle a une astuce psychologique pour rester dans le match pendant les cinq jours d'escale à Fort-de-France.
« Je sais qu'il y a une inertie et que souvent, après une course, j'ai encore un peu d'énergie avant de tomber. »,confie-t-elle. « J'avais vraiment le sentiment que cela n'allait pas coller avec le timing ici. Je préfère donc rester dedans et me dire que je suis toujours en course. C'est un peu comme en Figaro, où on a appris à être en mode repos, tout en restant impliqué dans la course. J'ai toujours vu la Transat Jacques Vabre et le Retour à la Base comme une course en deux étapes, pas comme deux courses différentes finalement. »
A nouveau, nous pouvons nous attendre à une compétition haletante à l'avant de la flotte entre Thomas Ruyant, en quête d'une quatrième victoire transatlantique consécutive, Yoann Richomme, qui aura à cœur de suivre le rythme de Thomas sur son sistership, et Jérémie Beyou, qui voudra mettre derrière lui sa quatrième place sur la Transat Jacques Vabre. En milieu de flotte, de nombreux skippers ont aussi des arguments à faire valoir, tandis que les meilleurs IMOCA à dérives se disputeront les honneurs, parmi lesquels Benjamin Ferré, Louis Duc et Guirec Soudée.
Romain, dont l'équipe travaille depuis l'arrivée sous la chaleur pour réparer les avaries de la transat aller, affirme que le routage suggère, pour l’instant, une course rapide en moins de 10 jours. « Nous allons faire 1 000 milles au nord, dans les alizés, pour trouver une grosse dépression et rentrer en France au portant »,résume-t-il. « La course s'annonce bien. Elle va être rapide. »
Isabelle attend également avec impatience des vents portants puissants sur la route retour vers le golfe de Gascogne, qui constitueront à la fois un bon test de vitesse et un entraînement parfait pour le Vendée Globe. « Pour l'instant, nous devrions avoir un bon départ », décrit-elle. « Nous allons trouver ensuite des vents portants pour traverser l'Atlantique, ce qui est une très bonne nouvelle. Si cela se confirme, cela va rendre la course très intéressante. »
« Cela va être un bon entraînement pour aller chercher du vent fort, au portant, dans une mer formée, un peu comme ce que nous pourrons faire dans les mers du Sud l’hiver prochain. Et si cela se concrétise, je pourrai me dire que j'ai bien fait ! »
Ed Gorman (traduit de l’anglais)
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