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Après avoir collecté des microplastiques et multiplié les relevés durant son Vendée Globe, Fabrice Amedeo poursuit sa démarche en s’élançant pour un tour de France de juin à juillet, à bord de son monocoque soutenu par Art & Fenêtres et Nexans.

Objectif : mesurer les niveaux de pollution aux microplastiques le long de nos côtes, obtenir de nouvelles données comparatives sur la présence de microplastiques dans l’Océan et dans la mer Méditerranée, tout en sensibilisant les jeunes générations à la préservation des océans au cours des escales. Un projet parrainé par Nicolas Hulot. 

Donner du sens à son engagement au-delà du défi sportif et de l’accomplissement personnel. C’est ce qui motive Fabrice Amedeo à coupler ses échéances de marin professionnel avec un engagement fort : contribuer à son échelle à la préservation des océans. Ainsi, lors du dernier Vendée Globe, il avait embarqué à bord de son IMOCA des capteurs pour relever le taux de CO2, la salinité et la température de l’eau, et la concentration en microplastiques. Ces données ont été transmises aux partenaires scientifiques de Fabrice : l’Ifremer, L’Université de Bordeaux, l’IRD, Geomar, l’Institut Max Planck, la Commission océanographique intergouvernementale de l’UNESCO et Oceanops. Chaque équipe spécialisée dans son domaine (microplastiques, CO2, température et salinité) traite les données, les analyse et modélise les résultats avant de les mettre à disposition de la communauté scientifique internationale en open data.

UN NOUVEAU CYCLE MAIS UN MÊME ENGAGEMENT

Alors qu’il entame un nouveau cycle, marqué par l’arrivée de nouveaux sponsors et de nouvelles couleurs sur son IMOCA, Fabrice Amedeo poursuit sur cette voie. Le 31 mai, il s’élancera de la Trinité-sur-Mer pour un tour de France, à bord de son voilier Art & Fenêtres – Nexans, afin d’effectuer les mêmes relevés, mais cette fois-ci à proximité de nos côtes.

« J’ai la chance de lancer un nouveau programme ambitieux jusqu’au Vendée Globe 2024, affirme le skipper. Je vais continuer à collecter des informations à chaque course mais j’avais envie d’aller plus loin. D’habitude, ce sont les scientifiques qui s’adaptent à mes contraintes liées à la performance du bateau. Là, je vais mettre mon bateau à disposition au niveau des trajectoires et des zones d’échantillonnage, avec un protocole beaucoup plus contraignant à bord pour réaliser les prélèvements. Le temps passé en mer sur nos IMOCA n’est jamais perdu. Nous en profiterons pour régler le bateau, ajuster les détails techniques suite au chantier d’hiver et pour nous entrainer en double pour la Transat Jacques Vabre, notamment lors du convoyage entre le Sud-Ouest de la France et la Méditerranée, » précise Fabrice.

Aller plus loin dans son engagement pour les sciences océaniques, aider les scientifiques à mieux comprendre les impacts du réchauffement climatique et de la pollution sur nos océans : c’est ce qui a poussé le skipper à envisager ce tour de France qui le mènera de la frontière belge, début juin, jusqu’en mer Méditerranée, fin juillet. En course, il relève les échantillons de microplastiques une fois par jour, la démarche étant trop contraignante pour être assurée de façon plus fréquente. Mais avec ce tour de France, les filtres seront changés toutes les 6 heures (dans la Manche et l’Atlantique), toutes les 8 heures en Méditerranée en vérifiant toutes les 10 minutes les volumes relevés. « Les scientifiques avec qui nous travaillons étaient particulièrement intéressés par l’étude de la concentration de microplastiques près des côtes ainsi qu’aux passage des estuaires, dans la baie de Seine, la Loire, la Garonne ou le Rhône où le bateau ralentira. »

L’INTÉRÊT DES PRÉLÈVEMENTS SCIENTIFIQUES PROCHES DES CÔTES

Jérôme Cachot, Professeur des Universités à l’Université de Bordeaux, laboratoire EPOC (Environnements et Paléoenvironnements Océaniques et Continentaux), explique que les prélèvements effectués près des côtes « ont un intérêt très complémentaire de ceux effectués au large. Ils permettront de mieux comprendre et anticiper les impacts de la pollution sur la biodiversité marine, plus riche en eaux peu profondes le long du littoral ».

Le Dr Catherine Dreanno, chercheure au laboratoire DCM (Détection, Capteurs et Mesures) et Research Associate à l’Ifremer, explique quant à elle que « des filtres de plus petite porosité (300, 100 et 10 μm – contre 30 μm de vide de maille habituellement en course) seront utilisés dans certaines zones comme les embouchures, avec des prélèvements plus réguliers afin de capturer des microplastiques de plus petite taille, sans risquer un colmatage du système. Déterminer la quantité et la nature chimique de ces petits microplastiques est un défi technologique ».

Christophe Maes, océanographe physicien de l’IRD, Lab. d’Océanographie Physique et Spatiale, estime par ailleurs « qu’il sera intéressant d’un point de vue scientifique, de comparer les concentrations et les types de microplastiques prélevés en Manche, en Atlantique et en Méditerranée où on s’attend à des concentrations dramatiques. »

Le capteur permettant de mesurer le taux de CO2, la température et la salinité de l’eau en surface sera également opérationnel lors des navigations le long du littoral français. Ces données seront traitées, analysées et mises à disposition de la communauté scientifique internationale. Elles permettront d’enrichir les bases de données et de vérifier et confirmer les données récoltées par ailleurs, par d’autres bateaux et systèmes de mesures.

UN PROJET VISANT À SENSIBILISER LE GRAND PUBLIC ET PARRAINÉ PAR NICOLAS HULOT

Au-delà de la contribution auprès de la communauté scientifique, la démarche de Fabrice Amedeo vise également à sensibiliser le plus grand nombre à ces questions brulantes d’actualité. Lors de son escale à Brest, prévue lors de la journée mondiale de l’océan (World Oceans Day), le 8 juin, mais aussi à Marseille, il compte multiplier les temps d’échange avec les plus jeunes. « C’est un des axes centraux de ma démarche », assure-t-il. De quoi rappeler le succès du guide pédagogique « Cétacé ! L’Océan boit la tasse ». Réalisé par le skipper en amont du Vendée Globe, en partenariat avec la Fondation de la Mer et l’Éducation Nationale, il a été distribué à plus de 80 000 élèves afin de les sensibiliser à la beauté et à la fragilité des océans.

Ce projet ambitieux, qui mêle recherche scientifique et sensibilisation, est soutenu par Nicolas Hulot, parrain de l’opération. « Son engagement est exemplaire et il a été très inspirant », confie Fabrice Amedeo. Les deux hommes ont échangé pendant le Vendée Globe, partageant leur fascination pour l’archipel de Tristan da Cunha, perdu au cœur de l’Atlantique Sud, avant de se rencontrer récemment en Bretagne.

« L’océan est notre matrice originelle, rappelle l’ex-ministre de la transition écologique et solidaire, à la tête de la fondation pour la nature et l’homme. Notre appétence pour le sel en est sans doute une ultime réminiscence. Mais nous partageons aussi avec l’océan une communauté de destin. Dans la période confuse que nous traversons, nous rappeler ce lien essentiel est une mission cruciale. Alors que la mer subit tous nos outrages, mobiliser, informer, sensibiliser sur une base scientifique telle est la raison d’être de ce tour de France et du projet océanographique de Fabrice Amedeo. » 

Hulot Amedeo

Le skipper n’en oublie pas ses échéances sportives. Il s’attachera à multiplier les milles et engranger de l’expérience en mer. Surtout, il profitera du convoyage autour de l’Espagne et du Portugal pour assurer sa qualification à la Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre qui s’élancera le 7 novembre prochain du Havre, en direction de la Martinique.