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Yoann Richomme a franchi la ligne d’arrivée de la première édition du Retour à La Base en première position ce samedi 9 décembre, à 17h03. Le skipper de Paprec Arkéa aura bouclé les 3 500 milles théoriques du parcours en l’espace de 9 jours 0 heure 03 minutes 48 secondes, à une vitesse moyenne de 16,19 noeuds (sur l’orthodromie).

Au gré de son option Nord, il a en réalité parcouru 4 256,68 milles à une vitesse moyenne de 19,70 nœuds. Yoann Richomme réalise là un exploit rare : s’imposer à l’issue de sa première course en solitaire à bord d’un IMOCA. De quoi s’affirmer comme l’un des grands favoris avant les multiples échéances qui s’annoncent en 2024.

Il a tenu jusqu’au bout, impressionnant leader qui n’avait pourtant jamais effectué une navigation en solitaire à bord de son bateau. Yoann Richomme s’offre sa première victoire de prestige en IMOCA, la première à bord de ce monocoque mis à l’eau en février dernier. Son succès, c’est celui d’une équipe qui s’est affairée comme jamais à fiabiliser et à optimiser son bateau tout au long de l’année. Le travail particulièrement conséquent réalisé en Martinique, entre la Transat Jacques Vabre et le Retour à La Base, a par ailleurs permis à Yoann de repartir au large avec sérénité, une 2e place sur la Route du Café et le plein de confiance en prime. Pourtant, celui qui déclarait avant tout assurer sa qualification au Vendée Globe, visant officiellement le Top 5, n’espérait pas tant. 

Mais dès le contournement de la Martinique puis lors du long bord vers le Nord, Yoann Richomme s’insérait aux avant-postes de la course. Son option audacieuse, plus Nord que ses rivaux au moment de contourner l’anticyclone des Açores afin de progresser vers l’Est, lui a permis de prendre les commandes de la course le 4 décembre dernier et de ne plus les lâcher. Déjà vainqueur de la Route du Rhum à deux reprises en Class40 (2018, 2022) et de deux Solitaire du Figaro (2016, 2019), le Lorientais ajoute donc une nouvelle victoire de prestige à son palmarès… Et prend déjà rendez-vous pour l’incroyable saison 2024 qui s’annonce. 

RLB23 Finish Paprec 1st 0912JLC1364© © Jean-Louis Carli / Alea / Retour à La Base

Premiers mots de Yoann À quai

"C’était magnifique cette arrivée, avec ces belles lumières et tous ces semi-rigides qui sont venus m’accueillir. Je me suis juste fait une petite frayeur car j’étais mal positionné sur la carte et quand je suis sorti pour faire une photo, je me suis rendu compte que j’allais me prendre l’île de Groix. j’ai juste eu le temps de l’éviter et de bifurquer, que d’émotion… Un grand moment que d’arrivée là en tête."

Le décalage tactique au nord

"Il m’a servi tout du long. Cela s’est essentiellement joué là. Mais c’est aussi dû à mon bateau qui est spécialement dessiné pour aller dans la brise, et j’ai cette facilité à mettre le curseur pour aller un peu plus haut. Au final j’ai quand même pris pas mal de plaisir à naviguer même s’il y avait des moments durs. C’est engagé mais ce sont des bateaux qui te le rendent bien, car ils te permettent de vivre des moments de surf de dingue."

C’était normalement une course de qualification, mais vous n’avez pas fait semblant.

"Personne n’a fait semblant ! On est parti de Martinique assez cool, mais on a vite basculé en mode régate toute la montée au nord. Même pour dormir c’était dur, et je me suis dit que l’on n’allait pas tenir 10 jours comme ça, et qu’il fallait se calmer. J’ai donc accepté de perdre un peu. Mais au final, j’ai fini par trouver mon rythme. Dans cette course, il y avait des coups d’accélérateur à mettre, il fallait savoir à quel moment, ce n’était pas évident, mais je m’en suis bien sorti. Et il y a beaucoup de choses à apprendre encore sur la façon de manier ces bateaux. On n’est plus dans le mode d’action des monocoques d’avant. On ne peut pas les mener à 100 % tout le temps sinon on casse tout. Un peu avant l’arrivée, je faisais encore des surfs à 35 nœuds et je me demandais à quel moment j’allais exploser le bateau contre une vague. Le curseur est très difficile à positionner."

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2e sur la Transat Jacques Vabre, premier sur Retour à la Base c’est quand même une grosse performance…

"Oui, faire 2 et 1 sur des courses comme ça, je suis très content pour l’équipe. J’ai aussi une pensée pour Thomas Ruyant qui a cassé sur la course alors qu’il était bien placé, et qu’il revenait fort. On a de belles montures avec nos plans Koch-Finot Conq, qui ont montré de très belles choses, en cet hiver 2023, à un an du Vendée Globe. Cela fait deux ans qu’on est au taquet sur ce projet, donc ce soir on a le droit de faire la fête (rires). On a mis à l’eau en février dernier, on a aussi passé pas mal de temps en chantier…"

Vous attendiez-vous à autant de monde sur les pontons de Lorient pour votre arrivée ?

"Le cinéma est fermé ce soir ou quoi (rires) ? C’est trop sympa de voir tout ce monde m’accueillir. Franchement, je ne m’y attendais pas."

Vous étiez fatigué en Martinique après la Jacques Vabre. Comment s’est passé cet enchaînement de deux transatlantiques ?

"J’étais crevé à Fort-de-France mais je suis parti avec pas mal de motivation. J’étais bien chaud. Je n’ai pas trop réfléchi. J’ai trouvé mon rythme à bord, j’ai bien dormi. Je ne me suis jamais senti dans une zone rouge totale. De toute façon, ces bateaux te l’interdisent. Si tu rentres dans las zone rouge, tu n’en sors jamais et c’est un enfer. En gros, tu pourrais te faire un planning journalier où tu dors la nuit, tu bricoles le jour, tu fais un peu de navigation, tu règles ton bateau, et tu retournes dormir. C’est vraiment intense."

RLB23 Finish Paprec 1st 0912AB1311© © Anne Beaugé / Retour à La Base

Y a-t-il de la casse sur le bateau ?

"Je n’ai quasiment plus de foils depuis mardi (5 décembre). Ça ne va pas leur faire plaisir aux autres (ses adversaires), mais bon… J’ai bricolé deux ou trois trucs. J’ai réussi à utiliser 30 % de mes foils. Ça ne fait pas beaucoup… J’ai cassé le système deux fois, de chaque côté. J’ai deux ou trois petites bricoles aussi, mais rien d’incroyable. Il y a des améliorations à faire par rapport au design, des choses un peu trop extrêmes qu’on avait faites. Ce sont des choses qu’on va régler cet hiver, dès qu’on pourra sortir le bateau de l’eau. Le chantier ne sera pas assez long (sourire). Ce sont des bateaux très exigeants. Pour l’instant, l’équipe a besoin de faire une pause. On va être en chantier jusqu’à début avril. Pas plus, car les transats arrivent ensuite (The Transat CIC le 28 avril et la New York Vendée le 24 mai). Ça va s’enchaîner sec, il va falloir faire des choix dans ce qu’on veut réaliser. Et appuyer surtout sur la fiabilité. On le voit : dès qu’un bateau à la moindre casse, c’est fini, tu es largué, les autres sont partis et tu ne reviens pas."

Que pensez-vous de ce modèle de course, Retour à La Base ?

"C’est pertinent. Il faut être organisé pour, ça demande des grosses équipes et des gros moyens. C’est sûr que ce n’est pas neutre pour nous, mais c’est jouable. C’est bien, en termes de formation, de voir les bateaux dans ces conditions. C’est intéressant de savoir où mettre le curseur. On apprend tous de cette expérience."

Vous saviez que votre concurrent Jérémie Beyou a eu de la casse à bord ?

"Je savais qu’il n’avait plus d’aériens quasiment depuis le début. Je communiquais avec lui par texto. Il en a chié. Mais il s’est bien arraché, et s’il termine deuxième, avec les problèmes qu’il a eus, chapeau… Moi, mon bateau fonctionnait super bien, je n’ai vraiment pas été embêté. C’était génial. On a une belle monture et on en est trop fier."