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Deux jours de mer et les premiers équipages IMOCA de la Transat Jacques Vabre Normandie Le Havre profitent déjà du petit temps au large des côtes portugaises pour vérifier leurs bateaux et panser les plaies éventuelles après la rencontre brutale avec un front des plus toniques au large de l’Ile d'Ouessant.

En effet, les premières heures de course ont vu la flotte contourner la pointe Bretagne puis accélérer vers le sud sous l’influence d’un vent soutenu de nord-ouest qui a permis aux foilers comme aux bateaux à dérives d’aligner d’excellentes vitesses moyennes.

En tête, Jérémie Beyou et Franck Cammas sur Charal se disputent le leadership avec Thomas Ruyant et Morgan Lagravière à bord de For People ainsi qu’avec Yoann Richomme et Yann Eliès sur Paprec Arkéa.

Ce matin, Charal avait 32 milles d'avance sur Paprec Arkéa, à environ 250 milles nautiques au nord-ouest de Lisbonne. For People était troisième, à 45 milles de Charal, Justine Mettraux et Julien Villion quatrième sur Teamwork, à six milles.

HD DSC06474© © Maxime Mergalet

A bord d’Initiatives-Cœur 4, Sam Davies et Jack Bouttell, actuellement en sixième position à 58 milles des leaders, confirment que les conditions au large de la Bretagne ont rendu infernale la vie à bord.

« Nous avons pris un bon départ et le bateau marche vraiment bien dans le vent fort », confiait ce matin Jack dans un vocal envoyé à l’IMOCA. « La première nuit, dans le front au large d'Ouessant, a été très brutale et le bateau a vraiment tapé fort. La vitesse n’était pas simple à contrôler et nous avons été bien malmenés avec Sam »,décrit-il avant d’ajouter à quel point il a été impossible de dormir sur toute cette phase.

A bord de Paprec Arkéa, Yoann Richomme était également préoccupé par le risque d’avarie au plus fort du vent à bord d’un bateau dont les deux couchettes ont cédé. « Mercredi matin, nous avons passé le front comme prévu. Le vent a tourné très rapidement et nous avons dû faire une grosse manœuvre. Après, ça a bombardé toute la journée ». La vitesse – plus de 23 nœuds de moyenne au cœur de la journée – et l’état de la mer obligeaient donc à redoubler d’attention. « C’était assez violent. Parfois, on essayait de calmer le bateau pour éviter la casse ».

HD 230511 YR polaRYSE YNR09082 110504 © Yann Riou / Polaryse

Les vents forts et la mer démontée ont eu raison de huit bateaux qui ont dû rentrer au port. Il s'agit de Biotherm (avarie de grand-voile), Groupe APICIL (bôme cassée), Lazare (voie d'eau), Stand As One (problème structurel), MACSF (avarie de grand-voile), Oliver Heer Ocean Racing (problème de gréement), Maître CoQ V (avarie de grand-voile), Be Water Positive (problème médical).

Sur le plan d’eau, les réparations n'ont pas manqué non plus. « Le bateau tient plutôt bien le coup »,poursuit Jack Bouttell. « Nous avons eu quelques petites avaries ici et là – un peu d’accastillage et d’autres choses, mais ce vent plus léger, nous a permis de réparer et tout est à 100% ».

Si la météo a été une première épreuve à gérer, Louis Burton et Davy Beaudart (Bureau Vallée) ont également dû faire face à une pénalité de cinq heures pour une erreur de positionnement sur la ligne de départ. Le duo a décidé de la réaliser tôt dans la course, ce qui leur a permis d'éviter le pire des conditions, au passage du front.

HD 5   IMOCA Bureau vallee   Louis Burton et Davy Beaudart credit Benjamin Sellier   wind4Production© © Benjamin Sellier

« C’est toujours très énervant de prendre une pénalité », confie le skipper malouin « Nous nous sommes rapidement concentrés pour savoir où serait le meilleur endroit pour l’exécuter. Nous avons fait le choix d’en finir assez vite et d’en profiter pour ne pas subir le front. De ce point de vue-là, nous sommes assez contents. »

Le prochaine grande étape pour les skippers et les co-skippers est de se frayer un chemin dans une zone complexe de vents légers centrée sur le sud-ouest de Lisbonne, qui ralentira leur progression vers les îles Canaries et les alizés. Cela ouvre d‘ailleurs de belles opportunités aux suiveurs pour rattraper leur retard sur le peloton.

Louis Burton rappelle que des décisions importantes doivent être prises dans les heures à venir.  “Il va y avoir la possibilité de partir sur des options ouest ou nord ou sud mais le point de convergence pour prendre cette décision-là est le long du Portugal donc c’est normal que tout le monde se soit dirigé vers le Cap Finisterre.”

Cette trajectoire est beaucoup moins stressante qu'une route plus directe ou plus nord à travers l'Atlantique, comme l’explique à son tour Yoann Richomme. « Nous allons avoir 24 heures un peu plus tranquilles pour descendre au vent de travers. Ensuite, nous allons chercher l’anticyclone au sud du Portugal pour se faufiler et aller chercher l’alizé », détaille le double vainqueur de la Solitaire du Figaro et de la Route du Rhum. « Des départs comme celui-là, ça use beaucoup. Ça tire sur le système… Mais on a maintenant réussi à bien se reposer pour la suite ! » 

Ed Gorman