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Il y a des vainqueurs inattendus, des équipes qui reviennent de loin pour arracher un titre au dernier moment et puis il y a ceux qui se frayent un chemin jusqu'à une position où ils deviennent imbattables. À bien des égards, ce sont les vainqueurs les plus impressionnants, et l'équipe 11th Hour Racing Team fait partie de cette catégorie.

Depuis l’escale brésilienne, l’équipe américaine a fait parler d’elle. Après deux deuxièmes places sur les deux premières étapes, et une troisième place sur la grande étape des mers du sud, 11th Hour Racing Team a raflé trois victoires d'affilée. L'équipe de Charlie Enright s'est alors imposée comme la force dominante d'un tour du monde plein de rebondissements, malgré une dernière étape qu’ils auraient souhaitée différente en raison de la collision au départ de La Haye. 
 
"Ce n'est évidemment pas la façon dont nous voulions gagner cette course", confie Charlie Enright à la Classe IMOCA à l’arrivée à Gênes. "Nous aurions préféré le faire sur l'eau, mais parfois la situation vous échappe. Et si on regarde notre course dans son ensemble, entre les étapes au large et les In-Port races, nous n'avons jamais terminé en dehors du podium. Si on fait une moyenne, nous avons terminé à la deuxième place. C'est ce que nous avons demandé dans le cadre de la réparation et c'est ce qui nous a été accordé. Au classement général, nous sommes en tête avec trois points d'avance, même si nous n'en avons pas vraiment eu l’impression tant la course a été serrée sur l’ensemble du tour du monde."

Charlie Enright participait cette année à sa troisième campagne The Ocean Race, et son aventure avec cette course n’a pas toujours été un long fleuve tranquille. Le fait que le skipper d’11th Hour Racing Team ait un mot pour ses adversaires au moment de sa victoire en dit long sur le marin qu’il est. 

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"Chaque concurrent de cette course a de quoi être fier", explique le skipper américain de 38 ans. "Nous avons fait face à nos difficultés, Team Holcim-PRB en a fait partie, tout comme Paul (Meilhat), Boris (Herrmann), l'équipe Guyot Environnement-Team Europe. On ne peut sortir de ce tour du monde indemne. Il est clair que chacun devrait être fier de ce qu'il a accompli sur cette course".
 
Pour Charlie Enright, le secret de la réussite de son équipe à partir du Brésil a été de ne pas changer l’ensemble du fonctionnement, mais plutôt de peaufiner chaque aspect pour rendre l’équipe plus compétitive. "Je pense que ce qui a fait la différence, c'est le sentiment d'urgence", explique-t-il. "Au Brésil, nous étions dos au mur. Tout le monde l'a ressenti et chacun s’est alors demandé ce qu’il pouvait faire au quotidien dans son domaine pour aller chercher la victoire. Nous n'avons pas fait trop d'efforts car ce n’était pas des changements massifs. C'était juste un petit peu ici et là, mais tout le monde a adhéré au concept.”

Mark Towill, CEO de l'équipe, évoque la façon dont Charlie Enright a mûri en tant que leader durant la campagne, ajoutant une nouvelle corde à son arc. "Charlie a beaucoup évolué au fil des différents challenges et épreuves à surmonter", déclare Mark Towill. "Il a toujours été très sympa et tout le monde l'adore, mais il a aussi appris qu'il y a un temps pour tout et qu’il faut parfois savoir changer de ton. On peut dire qu’il a élargi son répertoire de compétences en matière de leadership et a évolué dans la prise de décision, autant à terre qu'en mer".

HarryKH 230629 Genova IMG 4772 2© Harry KH / 11th Hour Racing / The Ocean Race

Pour Charlie Enright, cette course a été un long apprentissage dans sa façon d’agir dans les situations de conflit. "J'ai appris à me sentir à l'aise avec quelques frictions ici et là, à défier les gens et à essayer d'en tirer le meilleur parti", explique-t-il. 

Comme leurs rivaux Will Harris et Rosalin Kuiper du Team Malizia et Paul Meilhat sur Biotherm, Charlie Enright et Simon Fisher ont effectué l'ensemble de ce marathon autour du monde en IMOCA.

"C'était un défi et c'était deux choses différentes", explique le skipper américain. "Le parcours, et l'étape 3 en particulier, doit être l'un des plus difficiles que la course ait jamais connu en 50 ans d'histoire. À cela s'ajoute le fait que nous avons fait le tour du monde en IMOCA qui sont sans doute les plus difficiles à naviguer. Ce sont des bateaux violents. En équipage, on les a poussés à 100 %, et 100 % sur ces bateaux, ce n'est pas la même chose que sur un VO65".

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Mark Towill a pu constater mieux que quiconque à quel point la collaboration entre le skipper et le navigateur a été essentiel à la réussite globale de l'équipe. "Je pense que la dynamique entre SiFi et Charlie a évolué au cours des cinq ou six dernières années et SiFi a beaucoup apporté à cette équipe. Qu'est-ce qu'il y a à dire sur lui ? C'est un marin sérieux, incroyablement compétent et très intelligent", déclare-t-il. 

Comme toutes les équipes engagées dans cette aventure, 11th Hour Racing Team va maintenant prendre quelques jours de repos et passer du temps avec leurs familles et amis. "Il y a beaucoup de sacrifices de la part de tout le monde sur cette course, et pas seulement pour les marins, mais aussi pour l’ensemble de l’équipe à terre", explique Mark. "Vous êtes sur la route autour du monde pendant plus de six mois. Le sacrifice, c'est de ne pas être aux côtés de ses proches. C'est donc lorsque le sacrifice est mutuellement compris, accepté et respecté que l'on peut surmonter ces épreuves."

La bonne nouvelle pour Mark Towill, c'est que ce groupe de personnes, qui associe un message puissant sur l'environnement et le développement durable à des courses de haut niveau, n'en a pas encore fini avec la Classe IMOCA. "La course au large est maintenant dans notre ADN", annonce-t-il, "et lorsque vous regardez le monde de la course au large, c'est la Classe la plus forte qui puisse exister. Je n'ai pas d'idée précise quant à nos projets futurs, mais il serait difficile de ne pas imaginer de ne pas en faire partie."

HarryKH 230629 Genova 284A4801© Harry KH / 11th Hour Racing / The Ocean Race

Ed Gorman (traduit de l’anglais)